On peut vraiment comparer le système actuel des agences de notation comme le renard dans un poulailler ou un pédophile dans un CPE. Une entreprise marchande, conduite par l’appât du gain, pour noter les entreprises boursières, déjà on peut soupçonner tout le potentiel de conflit d’intérêt et d’actes de collusion. Mais lorsque ces agences ont aussi le pouvoir d’influencer la vie publique, et d’abuser de leur situation pour en tirer profit, peu importe les conséquences sociales, l’acceptation de cet état de fait relève de l’aveuglement idéologique.
Les témoignages rendus publics par la Commission d’enquête du Congrès des Etats-Unis sur la crise financière (FCIC), sont parfaitement éclairants et n’ont rien pour surprendre, sauf pour ceux qui refusaient de voir. Les anciens employés de Moody’s ont déclaré avoir subi des pressions pour attribuer des notes favorables à des produits financiers risqués afin d’assurer la signature de contrats !
Dans son témoignage écrit, Mark Froeba, ancien vice-président de Moody’s chargé des produits dérivés, a déclaré que la priorité donnée à la croissance de l’activité du groupe avait eu pour conséquence de faire passer les analystes sous l’autorité des banquiers d’investissement, ce qui les a conduits à accorder des notes indûment élevées à certains produits. « Fondamentalement, ils ont eu recours à l’intimidation pour créer une population docile d’analystes effrayés à l’idée de contrarier des banquiers d’investissement et prêts à coopérer le plus possible », a-t-il dit. Mark Froeba a quitté Moody’s en 2007 après y avoir travaillé 10 ans.
De son côté, Eric Kolchinsky, qui fut un temps chargé de la notation des CDO [collateralized debt obligations] liés aux subprimes, a expliqué que la culture d’entreprise de Moody’s avait changé en 2007, année durant laquelle une part importante de la rémunération des cadres a commencé à être payée en actions et en options. Il a décrit une entreprise obsédée par sa part de marché. « Même s’il n’y a jamais eu d’instruction explicite pour abaisser les critères de notation, il fallait s’expliquer et se défendre sur chaque contrat raté », a-t-il dit.
Le président de la commission d’enquête du Congrès, Phil Angelides, a déclaré lors des auditions que Moody’s était devenue « une usine à triple A », en référence à la note la plus élevée de l’échelle des grandes agences (Moody’s, Standard & Poor’s et Fitch Ratings).
Formée par le Congrès pour tenter d’identifier les causes de la crise financière de 2008, cette commission se penche notamment sur le fonctionnement des agences de notation financière et l’utilisation de leurs avis par les investisseurs. Elle doit rendre publiques ses conclusions au plus tard le 15 décembre. Les spécialistes pensent qu’une réforme devrait durcir l’encadrement des activités des agences de notation. Disons plutôt qu’une véritable réforme devrait encourager la création d’organisme sans but lucratif ou des sociétés publiques, contrôlées par plusieurs parties prenantes, pour jouer ce rôle essentiel de notation.
Discussion
Pas de commentaire pour “Des agences de notation sous influence”