Dans leur dossier du mois de mai (accès payant), le magazine français Alternatives Economiques aborde la question des écarts sans cesse croissants des revenus des Français, en raison principalement de l’enrichissement éhonté des plus riches. Comme ils le soulignent clairement, appuyé en cela par les statistiques officielles de l’Insee : les riches ont rompu les amarres avec le reste de la société. Depuis la fin des années 1990, leurs revenus ont augmenté dans des proportions spectaculaires pour atteindre des niveaux qui dépassent l’imagination de la plupart de leurs concitoyens.
Selon l’Insee, les « très hauts revenus », le 1 % les plus riches des contribuables (autour de 600 000 personnes), captent à eux seuls 5,5 % des revenus d’activité, 32,4 % des revenus du patrimoine et près de la moitié des revenus exceptionnels. Les revenus financiers ou de l’immobilier sont encore plus concentrés dans le haut de la pyramide. Ces revenus du patrimoine représentent 2,6 % en moyenne des revenus des 90 % les moins rémunérés, contre la moitié pour le 0,01 % des plus riches. Autre conclusion : les riches s’enrichissent. Entre 2004 et 2007, les très riches (le 0,01 % du haut de la pyramide), qui touchent 1,27 million d’euros en moyenne par an, ont gagné 40 % de plus. En moyenne, les 90 % les moins riches ont touché 9 % supplémentaires entre 2004 et 2007.
Le nombre de riches est aussi en hausse : une augmentation de 28 % de ceux qui déclarent plus de 100 000 euros annuels et de 70 % au-delà de 500 000 euros. Une situation amplifiée, depuis dix ans, par la baisse des impôts ! Le taux d’imposition sur le revenu des plus riches est très loin d’être confiscatoire : toujours selon l’Insee, il serait en moyenne de 20 % pour les 10 % les plus favorisés, et n’atteint que 25 % pour ceux qui perçoivent plus de 82 000 euros de revenus mensuels.
Au canada ce n’est guère mieux, évidemment. Le chercheur Michael Veall a récemment mis à jours ses données concernant la croissance des revenus des plus riches contribuables au Canada. La principale conclusion qu’il en tire : la concentration des revenus dans les plus grandes fortunes continue à s’accroitre. La part du revenu national accaparée par le 1 % des plus riches Canadiens est passée de 7,9 % en 1982 – quand la tendance à la hausse a débuté – à 13,8 % en 2007. La moyenne des revenus de ce groupe est de plus de 400 000 $; depuis 1982, il a doublé (hausse de 100 %).
Rien, absolument rien ne justifie de tels écarts. L’économie n’est pas plus productive, ou plus efficace, lorsqu’elle est moins égalitaire, bien au contraire. Tout plaide pour qu’il soit mis fin à cette démesure.
Que peut-on faire ? Nous disposons, avec les mouvements sociaux (syndicats, entreprises d’économie sociale) d’outils pour modifier la distribution des revenus entre le travail et le capital, et avec l’État – la fiscalité – l’outil pour faciliter une redistribution juste des revenus. Comme le souligne le magazine Alternatives Economiques, les enjeux vont au-delà des revenus des super-riches : la durabilité du développement passe par une solidarité nationale qui doit permettre de s’attaquer à l’endettement public tout autant qu’à l’émergence des nouveaux besoins sociaux – pauvreté, retraite, immigration, etc.
« A moins de supprimer des pans entiers de l’action publique, la question n’est plus aujourd’hui de savoir s’il faut augmenter les impôts, mais quand et comment les augmenter. »
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