L’auteur invité est Alain Lipietz, économiste et homme politique. Membre du parti Les Verts depuis les années 1980, il a été député européen entre 1999 et 2009.
Je reviens d’une conférence de presse convoquée par ATTAC sur la crise grecque. Pas mal de divergences entre les forces de gauche françaises (dont les Verts, la « gauche de la gauche » et des syndicats) soutenant la résistance populaire grecque au plan d’ajustement !
J’ai déjà pas mal discuté du sujet dans le forum de mon précédent billet, j’ai lu ce que disent Alter Eco (mâtin ! quel journal), Mediapart (remarquable article sur la presse allemande dans la crise) et discuté avec une verte allemande, j’ai lu les communiqués des eurodéputés verts… J’ai constaté aussi (sur Facebook) que l’argument à la Bild existe aussi en France ( « On est ruinés, on nous demande des sacrifices et on va payer pour les Grecs !? »).
Mon discours : qu’il y ait eu ce prêt massif est une victoire de la solidarité européenne contre l’égoïsme démagogique de Merkel. Ce qu’il faut critiquer, c’est le « partage du fardeau du remboursement ». Ce sont les riches Grecs qui ont empoché le déficit sous la droite (Karamanlis), et maintenant on fait payer les petits salariés quand il faut rembourser. Qui sont en effet les responsables ?
- Karamanlis qui a appliqué la doctrine sarkozyste (loi TEPA) : « Faire des cadeaux aux riches dans les périodes de vaches grasses et faire rembourser les pauvres en période de vaches maigres ».Plus bien sûr les énormes dépenses militaires contre « l’ennemi turc ».
- L’absence d’Europe politique, fédérale et solidaire.
- Les banques spéculant contre la Grèce avec l’aide des agences de notation.
- L’attitude Merkel alimentant la spéculation.
À l’inverse, une politique solidaire aurait consisté à combiner des dons « structurels « (FEDER) et des prêts, très tôt, pour casser les reins de la spéculation, et aider la Grèce à réformer sa fiscalité pour faire rembourser les riches.
Le représentant FSU soutient lui aussi que la responsabilité est celle des gouvernements avant les marchés financiers. Mais pour la « gauche de la gauche » (PdG, FASE, NPA) c’est la faute à l’Europe ouiouiste, au PASOK (Papandreou) et à DSK. Il ne faut pas critiquer Karamanlis (!!)
Leurs propositions (un peu confuses) : tantôt « annulation de la dette publique » (« dettes odieuses »), tantôt « moratoire sur la dette publique ». Propositions que j’ai critiquées dans le forum de mon billet précédent. Cela revient en outre à dire que les marchés avaient raison de spéculer (c’est-à-dire anticiper que la dette grecque ne sera pas remboursée), alors que nous avons dit le contraire pendant des mois. Avec tous les effets qu’on imagine sur les autres pays européens endettés.
Seule proposition intéressante : la BCE devrait pouvoir faire des prêts directement à un pays en difficulté. À creuser. C’est un des points sur lequel j’avais critiqué Maastricht et qui reste invariant sous Lisbonne. Comment éviter alors de donner à Trichet, ou à une majorité européenne réactionnaire, un pouvoir exorbitant ?
Pour moi le plus choquant est l’affirmation « Il ne faut pas critiquer Karamanlis ». Se rendent-ils compte que du même coup ils dédouanent la loi TEPA (boucler fiscal, etc.), alors que le « modèle grec » risque fort d’être appliqué demain à la France ? Aurélie Trouvé (d’ATTAC) conclut courageusement en soulignant le coût de la non-Europe.
On trouve ce texte et ses commentaires sur le blogue d’Alain Lipietz du magazine Alternatives Economiques
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