Les jovialistes de la reprise vont en prendre pour leur rhume : l’économie étasunienne perd près d’un demi-million d’emplois en juin alors que le Québec, de son côté, entre officiellement en récession. En effet, le PIB québécois recule de 4,8 % au premier trimestre 2009, après une diminution de 0,7 % au 4e trimestre 2008. Même si ce constat se compare un peu plus favorablement aux baisses respectives de 5,4 % et de 3,7 % observées pour l’ensemble du Canada, la situation ne fait que commencer à se détériorer pour des dizaines de milliers de travailleurs qui n’auront même pas accès au programme d’assurance emploi.
Avec la perte d’emplois de juin, à laquelle les analystes ne s’attendaient pas, qui fait augmenter le taux de chômage à 9,5 %, les États-Unis atteignent un record de 26 ans. C’est près de 15 millions de personnes sans emploi. Ce taux serait bien plus élevé s’il tenait compte de 6,4 millions de personnes disant vouloir trouver un emploi, mais non comptabilisées dans la population active, ou des neuf millions de celles contraintes de travailler à temps partiel contre leur gré du fait de la conjoncture économique.
“This is the only recession since the Great Depression to wipe out all jobs growth from the previous business cycle, a devastating benchmark for the workers of this country and a testament to both the enormity of the current crisis and to the extreme weakness of jobs growth from 2000-2007.” — Heidi Shierholz, the Economic Policy Institute.
Selon les chiffres publiés jeudi le 2 juillet, l’office européen des statistiques Eurostat annonce de son côté que le taux de chômage a atteint 9,5 % en mai dans la zone euro, son plus haut niveau depuis mai 1999. On s’attend à ce que le taux grimpe rapidement au-delà de la barre du 12 %.
En ce qui concerne le Québec, on apprend dans les Comptes économiques du Québec, publiés par l’Institut de la statistique du Québec, qu’au cours du premier trimestre de 2009 l’investissement en capital fixe des entreprises et des gouvernements a diminué de 6,2 % au taux trimestriel, soit une baisse en terme annuel de plus de 20 %. Ce qui est peu encourageant, c’est que cette décroissance s’intensifie depuis le quatrième trimestre 2008.
De leur côté, les consommateurs sont dans l’expectative. On le serait pour moins. Les dépenses personnelles en biens et services de consommation bougent à peine (+0,1 %), après la baisse de 0,7 % enregistrée au quatrième trimestre de 2008. Ce sont les dépenses personnelles en biens (0,3 %) qui permettent cette faible augmentation car les dépenses en services restent inchangées. Les consommateurs mettent un frein aux dépenses en biens durables (- 1,6 %) pour un deuxième trimestre consécutif. Plus particulièrement, les dépenses en transport et communication se réduisent de 2,3 %, à cause des achats reportés de véhicules automobiles et des dépenses moindres en pièces et réparations.
Globalement, le revenu personnel enregistre une diminution de 0,6 % au premier trimestre 2009 et s’établit à 259 milliards de dollars. Cette baisse provient des revenus relatifs au travail qui baissent de 0,6 %, mais également des revenus de placement qui enregistrent une troisième baisse trimestrielle consécutive (- 3,5 %). Les transferts en provenance des administrations publiques compensent en partie ces dernières diminutions grâce à une hausse prévisible de 8,7 % des prestations d’assurance emploi. Exprimé en termes réels au moyen de l’indice implicite des prix des dépenses de consommation, on constate que le revenu personnel disponible des ménages diminue de 0,3 %, après avoir enregistré une progression de 1,8 % au quatrième trimestre.
Lorsqu’on l’examine sous l’angle des secteurs d’activité, on constate que les reculs mensuels des industries productrices de biens sont attribuables à l’agriculture, la foresterie, la fabrication et la construction. Du côté des industries de services, la croissance provient principalement du commerce de détail, de la finance et des assurances, des services immobiliers et de la gestion de sociétés et, dans une moindre mesure, des services publics (soins de santé, assistance sociale et enseignement). Par ailleurs, on observe une baisse dans la production des services du transport et de l’entreposage, de l’information et de la culture, du commerce de gros et des services administratifs (services de soutien, de gestion des déchets et des services d’assainissement).
Excellent survol, je vous en remercie.
Il serait toutefois bon lorsque vous citez les taux de chômage des autres pays de mentionner qu’ils ne sont pas comparables, car n’ont pas la même définition. Par exemple, comme vous le savez sûrement, il y a toujours environ un point de pourcentage de différence entre le taux des États-Unis et les taux utilisés au Canada. Le taux de 9,5 % serait donc à peu près équivalent à 10,5 % au Canada. Les principales différences sont :
- les jeunes de 16 ans ne font pas partie de la population active aux États-Unis;
- pour être considéré en recherche d’emploi, une consultation des offres d’emplois ne suffit pas aux États-Unis, mais suffit au Canada (ce serait la plus grosse différence);
- les personnes qui ne cherchent pas d’emploi parce qu’elles ont une date de rappel prévue dans moins de quatre semaines sont considérés en chômage au Canada, pas aux États-Unis.
Je ne connais toutefois pas la différence entre le taux européen et celui des États-Unis et ne peux donc pas savoir si le 9,5 % européen correspond au 9,5 % des États-Unis.
C’est assez étrange que le taux de chômage, tout en étant un des indicateurs du marché du travail les plus utilisés, tant par les journalistes que par les citoyens, est un de ces indicateurs les moins bien compris. Combien de fois n’ai-je pas entendu dernièrement que les prestataires de l’aide sociale ne peuvent pas être en chômage, ni les personnes âgés de 65 ans et plus ? On dit que seulement 40 % des gens qui perdent leur emploi ont droit à des prestations d’assurance-emploi, tandis que qu’un chômeur n’est pas une personne qui a perdu un emploi, mais une personne qui en cherche un. Environ le tiers des chômeurs (environ 30 % en hiver et 40 % l’été) n’ont pas travaillé depuis au moins le premier janvier de l’année qui précède la semaine de référence du recensement ou de l’Enquête sur la population active. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas demander d’amélioration au programme d’assurance-chômage, au contraire, mais c’est tannant d’entendre sans cesse des données mal interprétées (en passant, le ratio «bénéficiaires ordinaires sans gains déclarés»/«chômeurs» était en 2008 d’environ 50 % au Québec, et de 40 % pour l’ensemble du Canada).
C’est vrai que les concepts de taux d’activité et de taux d’emploi ne sont guère mieux compris. Mais, comme ils en parlent moins, ils se trompent moins !
Oups, petite erreur, pas bien grave, mais quand même :
Les jeunes de 15 ans ne font pas partie de la population active aux États-Unis, mais en font partie au Canada. Ceux de 16 ans en font partie dans ces deux pays.