Communiqué, IRIS– Les systèmes de bonification à la performance, actuellement en croissance dans le secteur public, sont mis en place et maintenus sans analyse sérieuse de leurs coûts et de leurs conséquences, alors que tout porte à croire qu’ils sont généralement néfastes. C’est ce que révèle une étude publiée aujourd’hui par l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) qui conclut également que seuls les hauts dirigeants des organisations publiques en tirent des bénéfices.
L’étude constate une croissance des montants alloués aux bonis dans la dernière décennie. Dans six organisations du secteur public (Hydro-Québec, SAQ, Commission des services juridiques, Secteur de la santé, Loto-Québec, SAAQ), les bonis à la performance totalisaient plus de 105 M$ en 2009, une augmentation de 15% en seulement 4 ans. « Pourtant, outre Hydro-Québec et Loto-Québec qui ont refusé de nous donner accès à cette information, aucune des organisations étudiées n’a évalué ses systèmes de bonis afin de savoir dans quelle mesure leurs objectifs étaient atteints. Personne ne peut même nous dire quels sont les coûts d’administration de ces systèmes. Selon l’OCDE, ces coûts peuvent atteindre jusqu’à 5% de la masse salariale », note Simon Tremblay-Pepin, co-auteur du rapport.
« Les entrevues que nous avons réalisées au Québec et les études faites à l’étranger sur les bonis dans le secteur public montrent une foule de problèmes avec ces modes de rémunération. Contrairement à ce que l’on prétend, et bien que tout le monde soit content de recevoir un peu d’argent supplémentaire, les systèmes de bonis n’augmentent pas de façon significative la motivation des employé-e-s. Ensuite, les bonis nuisent à la flexibilité de la gestion. À la SAQ par exemple, des cadres peuvent être incités par le système de bonis à ne pas engager de nouveaux employés afin de ne pas dépasser les budgets, et ce même s’il manque de personnel sur le plancher pour servir la clientèle de façon adéquate. Enfin, les bonis peuvent causer des tensions dans les relations interpersonnelles et des sentiments d’injustices quand les systèmes paraissent arbitraires, ce qui est le cas à l’aide juridique, entre autres », constate Laura Handal, co-auteure de l’étude.
« On pourrait se demander pourquoi, face à tous ces problèmes et au peu de bénéfices constatés, le secteur public maintient de tels systèmes de rémunération. Nous avons deux hypothèses qui peuvent être complémentaires. Il s’agit soit d’un acte de foi pur et simple où l’on applique au secteur public ce que l’on prétend bon dans le privé. Soit ce sont les hautes directions des organisations publiques qui font la promotion de ces systèmes. En effet, les chiffres recueillis suggèrent que les bonis participent à accroître la différence de salaire entre les hauts dirigeants et les autres salarié-e-s. À la SAAQ par exemple, les bonis des cadres supérieur-e-s représentent un pourcentage de leur salaire plus élevé que pour les autres employé-e-s recevant des bonis. Ainsi, le salaire des dirigeants croît quatre fois plus rapidement que celui des autres salarié-e-s recevant des bonis. Au final, les montants octroyés en bonis pourraient bien être intégrés à la rémunération fixe, on économiserait quelques millions en gestion et on éliminerait bien des tracasseries inutiles qui nuisent aux services offerts », souligne Simon Tremblay-Pepin.
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