L’auteur invité est Jean-François Lisée, ancien conseiller des premiers ministres Jacques Parizeau et Lucien Bouchard de 1994 à 1999, maintenant directeur exécutif du Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal (CERIUM).

Chaque vendredi, Jean-François Lisée met en ligne des études qui permettent d’interrompre « … le lancinant commentaire anti-modèle québécois des plumes économiques locales ». Voici son billet du 28 janvier.

Depuis des années, le patronat et la droite en général affirment démontrer la médiocrité des Québécois en utilisant un argument canon: les Américains ont un niveau de vie d’au moins 21% plus élevé que les Québécois.

Ils ont raison lorsqu’ils parlent de 100% des Américains. Mais si on compare 99% des Américains, ils ont tort. Pourquoi ? Parce que le 1% des Américains les plus riches captent une portion absolument disproportionnée de la richesse produite chez nos voisins: 24%.

Dans des chiffres publiés ici pour la première fois, je présente trois graphiques, utilisant les calculs récents de l’économiste Pierre Fortin qui établit le revenu réel des Américains et des Québécois (après impôts et transferts).

Dans un premier temps, voici ce qui se produit lorsqu’on compare 90% des Américains à 90% des Québécois: […]

C’est net, 90% des Québécois ont un niveau de vie moyen supérieur de 2% à celui de 90% des Américains. L’explication ? Le 10% des plus riches Américains captent 48% du revenu annuel aux USA, contre le quand même considérable 33% des revenus captés par les plus riches 10% de Québécois.

En fait, ces chiffres ne tiennent pas compte de cette richesse que les Québécois choisissent davantage que les Américains: le temps de loisir. Essentiellement par choix, les Québécois ont un temps de travail d’environ 12% de moins que les Américains.
Ce qui signifie que 90% des Américains doivent travailler 100 heures pour obtenir un peu moins du revenu que nous obtenons en travaillant 88 heures.

Un peu plus haut: 95%

Sachant cela, montons maintenant à 95% de nos deux populations. Et indiquons la part de travail que les Américains doivent accomplir en plus.[…]

Ici, le Québécois empoche, à temps de travail égal, 9,5% de plus de revenu que son collègue américain. Il faut que son collègue américain travaille davantage (13% d’heures de plus) pour le rattraper, puis le dépasser d’à peine 2,8%. Il est clair pour moi que 95% des Québécois sont plus riches au total: revenu et temps de loisir.

Comme pour le graphique précédent, nous avons ici soustrait du revenu moyen la part captée par les 5% d’Américains les plus riches (36,5%) et les 5% de Québécois les plus riches (22%).

Un peu plus haut: 99%

Nous sommes au dernier étage, celui des 99% de la population. La partie se corse. Mais reprenons le même exercice: […]

On constate encore qu’à travail égal, 99% des Québécois empochent 7% de plus que 99% des Américains, qui, lorsqu’ils travaillent 13% d’heures en plus dans l’année, rattrapent et dépassent leur voisin de 6%, mais au coût de moins d’heures de loisir.

Je mets les trois cas de figure car mes lecteurs qui mettront en cause l’utilisation du temps comme une richesse sauront que, même sans cette variable, le niveau de vie québécois dépasse l’américain dans 90% des cas, et que la différence de niveau de vie de 21% dont on nous rebat les oreilles n’a de valeur que dans 1% des cas.

Richesse du pays et richesse de la population

Ces calculs démontrent combien l’inégale répartition des revenus peut faire écran lorsqu’on compare la nation occidentale la plus inégalitaire (les USA) et le Québec qui l’est nettement moins.

Cela dit, le fait que le 1% des riches américains captent absurdement 24% de la richesse créée par 100% des Américains est un symptôme de la dysfonction de la distribution des revenus aux USA. Le fait subsiste que l’économie américaine produit davantage de richesse, par personne, que l’économie québécoise.[…]

Pour lire le texte au complet, avec les trois graphiques et les notes, il faut aller sur le blogue de Jean-François Lisée