Le projet de taxe sur les transactions financières (TTF), au niveau international, est extrêmement important. C’est d’abord un pas de géant vers la reconnaissance d’une « société mondiale » avec ses règles et ses institutions spécifiques, dont celle de la taxation. C’est ensuite l’accès à une source de revenu autonome permettant de financer des biens publics mondiaux. C’est enfin une autre façon de réguler la finance internationale. Ce n’est qu’un pas supplémentaire, mais crucial.
Or, le 8 mars dernier, contre toute attente, le Parlement européen a adopté une résolution appelant à taxer les transactions financières internationales. Alors qu’au G20 les pourparlers piétinent pour l’instauration d’une TTF, l’Union européenne pourrait très bientôt mettre en place les premiers jalons de la taxe sur les transactions financières internationales. Par 529 pour, 127 contre et 19 abstentions, les eurodéputés ont massivement soutenu le rapport présenté par l’élue socialiste grecque Anni Podimata. C’est la prise de position de la chancelière allemande Angela Merkel qui aurait permis d’enlever le vote, alors que les conservateurs français et la Commission européenne affichaient leurs réserves.
Selon ce rapport, une taxe (entre 0,01% et 0,05%) sur les transactions financières internationales pourrait rapporter quelques 200 milliards d’euros par an à l’échelle européenne et 650 milliards si elle était appliquée au niveau mondial. De quoi réfréner la spéculation de court terme (puisque les opérations seraient plus coûteuses), alléger les souffrances des pays les plus pauvres et financer les biens publics dont dépendent les citoyens.
Pour le moment, le geste reste symbolique puisque c’est à la Commission européenne que revient la compétence d’appliquer ou non une telle taxe. Mais le Parlement a adopté – à une majorité plus faible mais nette – un amendement au rapport Podimata indiquant que l’Union européenne devrait mettre en place la taxe même de façon unilatérale, sans l’accord d’autres pays comme les États-Unis ou le Japon, qui y sont hostiles. Le Commissaire européen à la fiscalité, Algirdas Semeta, a immédiatement réagi en affirmant que la Commission n’accepterait pas de mettre en danger la compétitivité européenne par une mesure unilatérale.
La balle est maintenant dans le camp du G20, avec une proposition en bonne et due forme sur une TTF inscrite à l’ordre du jour. Dans cette perspective, ATTAC a lancé une vaste campagne internationale avec une pétition en ligne pour le grand public ainsi qu’une pétition s’adressant à la communauté des économistes. Alors que le président Sarkozy préside cette année le G20, et que ce dernier veut laisser sa marque avant les présidentielles de 2012, les opportunités sont saisissables.
La France a déjà défendu l’idée que la TTF est le seul moyen crédible d’aider les pays pauvres et de financer le fragile accord obtenu en 2009 au sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique, alors que les finances publiques étatsuniennes ou européennes sont dans le rouge. La France et l’Allemagne seraient donc ouvertes à un scénario où l’Europe et d’autres pays avanceraient sur cette mesure alors que d’autres continueraient à y réfléchir.
« Après tout, relève Sarkozy, si la crise que nous connaissons est si forte, c’est parce que la finance n’a pas toujours été exempte de quelques reproches », jugeant raisonnable de « considérer que ceux qui ont tellement contribué à une crise d’une telle ampleur contribuent aussi un peu au développement des pays les plus pauvres qui en ont le plus souffert ».
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