Le gouvernement Charest cherche depuis près de 8 ans à faire accroire au bon peuple que les PPP sont « pas pire pantoute » pour les dépenses publiques. Qu’en faisant appel à l’efficacité du privé et en misant sur l’appât au gain, on peut faire beaucoup mieux que la « bureaucratie inefficace » du secteur public.
Pourtant, systématiquement, lorsque des experts indépendants analysent des exemples concrets de projet réalisés en PPP, les résultats leurs sont toujours défavorables. Le dernier en date est l’étude réalisée par MCE Conseils sur le premier Centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) en partenariat public-privé. Les constats sont édifiants. L’étude évalue que le budget de 203 millions $ sur 25 ans pour le CHSLD Saint-Lambert-sur-le-Golf géré par le privé ne tient pas la route, qu’il se révélera plutôt à 287 millions $.
L’étude fait aussi valoir que les bas salaires – les préposés aux bénéficiaires ne sont payés que 12 $ en moyenne, contre 18 $ dans le secteur public – devront être rehaussés pour garder son personnel en ces temps de pénurie. Selon un vice-président de la FSSS-CSN, cité par Le Devoir, « On note déjà un impact catastrophique sur les salariés et les patients, dénonce Guy Laurion, vice-président de la FSSS-CSN. Depuis l’ouverture, on évalue le taux de roulement du personnel à 44 %. C’est plus du double de ce qu’on retrouve normalement. »
L’étude de MCE Conseils calcule que le CHSLD en PPP coûtera 60 millions de plus aux contribuables que s’il avait été construit en mode traditionnel et géré par le public. Le budget d’un mode public est en effet assez bien prévisible : il en coûterait 227 millions $, contre 287 millions $ pour le PPP. À l’opposé, l’étude publiée en 2009 par Ernst & Young évaluait que le PPP ferait économiser 98 millions $ aux contribuables. Y a quelqu’un, quelque part qui manipule les chiffres. De prime abord, je doute de l’indépendance d’Ernst & Young dans cette affaire.
Le Groupe Savoie, propriétaire du CHSLD Saint-Lambert-sur-le-Golf, a une expertise reconnue dans le domaine des résidences pour personnes âgées. Mais la gestion d’une institution de santé relève d’une toute autre logique. Et c’est d’autant plus vrai dans le contexte actuel où l’état de santé des résidents des CHSLD est appelé à se détériorer. L’étude de MCE Conseils est particulièrement juste dans l’analyse de ces enjeux et de leurs impacts sur le mode PPP. Elle nous rappelle que la supposée supériorité du privé repose d’abord et avant tout sur l’idée que c’est la forte concurrence entre les organisations qui ouvrent sur l’efficacité. Or, d’une part le système étatsunien de santé nous montre que cela ne s’avère pas nécessairement, et d’autre part est-ce vraiment ce que nous voulons en santé ? Le seul résultat prévisible au Québec est que les PPP seront dans des positions de monopole ou d’oligopole, et qu’ils en profiteront pour tirer tout le jus possible de leur rente de situation.
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