L’auteur invité est Gilles Raveaud, chriniqueur au magazine Alternatives Economiques.
Pour la plupart des économistes, la restructuration des dettes grecque et irlandaise, c’est-à-dire leur non-remboursement intégral, est inévitable. Mais comment procéder ? Une première piste est proposée par Daniel Gros, directeur du Centre d’études de la politique européenne (Bruxelles), et Thomas Mayer, directeur de la recherche à la Deutsche Bank. Elle consiste à créer un Fonds monétaire européen. Ce FME, à la manière du FMI, prêterait sous condition aux Etats en difficulté. Les Etats ont repoussé cette idée, préférant créer une Facilité européenne de stabilité financière (FESF). Cette Facilité est un peu un sous-FME : elle permet de prêter aux Etats en difficulté, mais elle n’est pas en mesure d’organiser le défaut de paiement d’un Etat, comme aurait pu le faire le FME.
Gros et Mayer estiment cependant que la FESF pourrait permettre de sortir de l’impasse actuelle, en rachetant les dettes grecque, irlandaise et portugaise à leurs valeurs de marché, les créanciers subissant une perte estimée à 20 %. Ensuite, les Etats concernés devraient rembourser la Facilité, éventuellement à un taux d’intérêt réduit. Avec ce système, les pays européens qui alimentent la Facilité prennent le risque de ne pas voir leurs prêts intégralement remboursés. Mais, pour Gros et Mayer, c’est le prix du sauvetage de la zone euro.
A cette solution technique, Yanis Varoufakis professeur à l’université d’Athènes, préfère une démarche plus politique. Avec, tout d’abord, la mise au point d’un » grand accord » entre les représentants des Etats concernés, les dirigeants de la Banque centrale européenne (BCE), la Commission européenne et les grandes banques privées : les banques accepteraient de perdre une partie de leurs créances en échange de réformes dans les pays concernés. Ensuite, avec la fusion des dettes nationales, à hauteur de 60 % du produit intérieur brut (PIB), en euro-obligations, qui permettent à tous les Etats de la zone euro de payer le même taux d’intérêt. Et, enfin, avec le financement d’investissements européens par la Banque européenne d’investissement.
Pour Dominique Plihon professeur à l’université Paris-XIII, le remboursement de la totalité des dettes n’est pas souhaitable, car il impose des mesures d’austérité aux conséquences dramatiques. Plihon estime que cette dette est illégitime et résulte à la fois du sauvetage des banques et des réductions d’impôts passées. Il relève également que l’exemple de l’Islande démontre qu’un pays peut, grâce au non-remboursement d’une partie de sa dette, renouer avec la croissance. Enfin, pour lui, cette décision serait à compléter par le financement d’une partie des dettes par la BCE, et par des mesures strictes d’encadrement des marchés financiers.
Une chose est sûre : infliger aux pays endettés des mesures drastiques en vue du remboursement intégral de leur dette est la pire solution. Il reste donc à espérer, pour une fois, que le concert des économistes soit entendu par les dirigeants européens. Et qu’une réforme fiscale d’envergure soit mise en oeuvre dans chaque pays, permettant de réduire justement les déficits.
On peut lire le texte au complet en allant sur le site d’Alternatives Economiques n° 300 – mars 2011.
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