Voici la version écrite du documentaire diffusé par [Télé-Québec dimanche le 5 juin dernier] sur la façon dont les produits chimiques mettent nos vies en danger, en particulier de par leur présence dans notre alimentation. Plusieurs parties montrent les effets nocifs de divers produits – pesticides, aspartame, bisphénol A – sur notre santé à partir d’exemples très concrets. Mais tout l’intérêt du livre se trouve ailleurs.
A partir d’enquêtes précises, informées, minutieuses, l’auteure met à jour l’alliance entre une partie de la communauté scientifique et la grande industrie pour truquer, tromper et cacher les conséquences nocives de l’utilisation que cette dernière fait de certains produits chimiques. Et on a encore plus froid dans le dos lorsque la suite démontre, à partir de la notion de « dose journalière acceptable » de cochonneries que notre organisme est censé supporter, que les autorités publiques chargées de nous protéger sont au mieux dépassées, au pire complices de la quête de profits des entreprises, quel qu’en soit le coût en termes de santé publique.
Comment s’en sortir ? A court terme, manger bio. A moyen terme, restreindre par la loi l’utilisation des produits toxiques. Et tout de suite, informer pour que vive un débat démocratique et contradictoire sur ce sujet. Ce livre y apporte une pierre importante.
Notre poison quotidien. La responsabilité de l’industrie chimique dans l’épidémie des maladies chroniques, par Marie-Monique Robin
La Découverte-Arte éditions, 2011, 479 p., 22 euros
Recension faite par Christian Chavagneux, journaliste à Alternatives Economiques.
Ce que j’ai trouvé personnellement le plus percutant et le plus scandalisant dans le film que j’ai visionné hier est la révélation que les organismes de règlementation se basent souvent sur des études non-publiées et parfois même secrètes de l’industrie pour établir leurs normes. C’est le même genre d’études que l’industrie du tabac et de l’amiante se servaient avant pour dire que leurs produits sont inoffensifs.
Une autre révélation majeure que contient le film est la révélation de la nature non-scientifique des normes établies: elles se basent sur un principe arbitraire de diviser par 100 les doses produisant à court terme un effet néfaste mesurable chez les animaux. C’est un comité bureaucratique qui a décidé de ce principe!
Encore un autre aspect majeur souligné par le film est que le principe non-scientifique de division par 100 ne convient absolument pas dans le cas des produits qui sont des «perturbateurs endocriniens», c’est-à-dire des produits qui ont un effet sur notre système d’hormones ou qui produisent des effets de type hormonal. Des quantités infimes d’hormone produisent des effets majeurs dans l’organisme.
Chapeau à la réalisatrice du film Marie-Monique Robin! Elle a fait un travail d’enquête exemplaire et un montage pédagogique très facile à suivre et à comprendre alors que le domaine des normes est habituellement un monde compliqué et aride.