Déjà que l’obsession budgétaire des gouvernements européens rendait le retour en récession comme un scénario probable ! C’est maintenant le fanatisme antiétatique du Tea Party aux États-Unis qui rendra la chose de plus en plus prévisible. S’ils n’étaient pas contrôlés par une oligarchie égoïste et sans scrupule, les États-Unis pourraient très facilement – comme ils l’ont fait il y a une dizaine d’années sous l’administration Clinton – résoudre leur problème de déficit en haussant les taxes et les impôts des citoyens, en particulier des plus riches.
Mais à l’exception de quelques progressistes dans les classes aisées, les riches étatsuniens préfèrent voir plonger l’économie des États-Unis, voire du monde, en récession plutôt que partager une partie de leur richesse dans une perspective solidaire. Parmi ces riches, le plus riche d’entre eux a lancé un appel à la raison : « Pendant que les pauvres et les classes moyennes combattent pour nous en Afghanistan, et pendant que de nombreux Américains luttent pour joindre les deux bouts, nous, les mégas-riches, continuons à bénéficier d’exemptions fiscales extraordinaires », déclare le fameux dirigeant du fonds d’investissement Berkshire Hathaway, Warren Buffett. M. Buffet explique que son taux d’imposition par l’État fédéral représentait 17,4% de ses revenus imposables l’an dernier, alors que celui des 20 personnes travaillant dans son bureau était compris entre 33 et 41%. Pour lui, le discours de la droite ultralibérale, qui affirme que les impôts tuent les emplois, est ridicule. Le taux d’imposition des riches, affirme-t-il, était beaucoup plus élevé dans les années 1980 et 1990, et pourtant près de 40 millions d’emplois ont été créés entre 1980 et 2000. « Vous savez ce qui s’est passé depuis : des impôts plus bas et beaucoup moins de créations d’emplois. Les gens investissent pour gagner de l’argent, et une imposition potentielle ne les a jamais fait fuir ».
Mais le système politique de ce pays est totalement incapable de faire les choix audacieux qui sont nécessaires pour changer l’état des choses. Obama n’a pas le courage de nommer les Stiglitz et Krugman de ce monde comme conseiller pour l’aider à reconstruire un projet de société plus juste. Aujourd’hui, les près de 15 millions de chômeurs (9,2% de la population active), dont 4,4 millions qui le sont depuis plus d’un an, et 26 millions de sous-employés (16,2%), n’ont plus aucun espoir. Depuis l’arrivée d’Obama au pouvoir, le secteur public a vu http://thinkprogress.org/yglesias/2011/07/08/263588/the-conservative-recovery-continues-2/ ses effectifs fondre de 500 000 emplois. Et avec ce que vient de signer l’administration Obama, ce sera encore pire dans les prochaines années. Étant donné la faiblesse du marché du travail, ce sera autant de faillites personnelles et de saisies de maison à venir. La probabilité de double récession s’accroît d’autant.
Le Canada sera inévitablement rattrapé par cette récession, si elle survient. Les hausses de prix que nous connaissons dans le domaine des ressources, y compris des aliments, devront tôt ou tard conduire la Banque du Canada à hausser ses taux d’intérêt. Les données de juillet de l’indice des prix à la consommation indiquent qu’ils ont augmenté de 2,7 % au cours de la dernière période de 12 mois, principalement en raison des prix plus élevés de l’essence et des aliments achetés au magasin. Cette progression fait suite à la hausse de 3,1 % enregistrée en juin et à celle de 3,7 % observée en mai. Or la Fed étatsunienne a annoncé qu’elle maintiendrait les taux des États-Unis à leur bas taux actuel jusqu’à l’été 2013 !
Plus le retour à la normale se fera attendre, plus il risque d’être brutal, prévient Jimmy Jean, économiste principal chez Desjardins. « Les risques d’inflation ont globalement augmenté », répète-t-il, citant un récent rapport de la Banque des règlements internationaux. « Certains pays doivent mettre en balance la nécessité de procéder à un resserrement monétaire et les vulnérabilités liées à des bilans et à un secteur financier encore fragile. Mais, lorsque les banques centrales commenceront à relever leur taux, elles risquent de devoir le faire à un rythme plus rapide que lors des phases de resserrement précédentes. »
La hausse inévitable des taux d’intérêt sera un facteur supplémentaire de la montée de la devise canadienne, qui profite déjà de la hausse des prix énergétiques due à la rareté relative du pétrole. Le Québec et l’Ontario, qui ont chacun un secteur manufacturier important, seront les grands perdants de cette situation, alors que les provinces pétrolières profiteront de l’enchérissement du prix de l’énergie.
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