Maintenant que le Groupe TMX, qui exploite les bourses de Toronto et Montréal, a convenu avec London Stock Exchange Group (LSEG) de résilier leur convention de fusion, toute la place est maintenant faite pour aller de l’avant avec l’offre du consortium canadien Maple.

Vers la fin juin, la majorité des actionnaires du Groupe TMX qui ont voté par procuration ont appuyé la résolution relative à la fusion. Mais il était néanmoins évident que le seuil des deux tiers requis pour approuver la fusion n’allait pas être atteint. Les partenaires ont donc annoncé l’abandon de la transaction.

Pourtant, ce n’est pas parce que les financiers de l’oligarchie internationale n’ont pas essayé : 11 dirigeants de grandes entreprises canadiennes du secteur de la finance avaient officiellement défendu le projet de fusion. Les administrateurs de la firme Caldwell Securities étaient au nombre des signataires. La proposition londonienne avait obtenu le soutien, entre autres, de l’influente firme-conseil auprès d’actionnaires International Shareholder Services, ISS. La firme estimait que cette proposition était moins risquée que la contre-proposition du groupe Maple. La firme-conseil Glass Lewis & Co appuyait également le projet de la bourse londonienne.

Mais les petits barons de la finance canadienne, qui voyait dans ce projet une perte sensible de leur pouvoir d’influence, en ont voulu autrement. Par exemple, le gourou canadien du monde de la finance, Stephen Jarislowsky, se réjouissait de l’annulation de la transaction entre le Groupe TMX et le LSEG. « Il faut que le Canada reste autonome », explique le financier qui réitère son soutien à l’offre de Maple. « En quoi le fait de vouloir développer soi-même sa bourse relève-t-il du repliement sur soi et d’une attitude protectionniste ? Est-ce que cela signifie que nous devons nous taire et laisser partir nos compagnies et nos institutions même si nous croyons fermement que nous sommes les mieux placés pour les faire croître au bénéfice de notre pays, aussi bien localement qu’au plan international ? » Évidemment, ce n’est que lorsque ces propos sont tenus par des souverainistes québécois que ça devient déplacé, inapproprié, dépassé !

Dans un communiqué, le porte-parole du consortium Maple, Luc Bertrand – celui qui s’est empli les poches en vendant la Bourse de Montréal à TMX -, avance que le résultat du vote démontre l’intérêt des actionnaires du Groupe TMX envers la proposition canadienne. Il va donc entreprendre des négociations avec les administrateurs de l’exploitant boursier, qui avaient rejeté par le passé l’offre hostile de Maple. Je rappelle que le consortium Maple regroupe des institutions financières et bancaires comme la Banque Nationale, le Mouvement Desjardins et la Caisse de dépôt et placement du Québec. Comme c’est touchant de voir ces grandes institutions financières veiller ainsi à la sauvegarde de nos institutions… Mais au moins, l’actionnariat très diversifié du Groupe Maple, y compris par la présence importante de groupes québécois, devrait maintenant permettre d’éviter de voir se reproduire de nouveaux scénarios de ce type : personne ne contrôlera abusivement la nouvelle entité.

En plus de mettre la main sur TMX, Maple compte également faire l’acquisition de la chambre de compensation CDS et Alpha, la plateforme de négociation boursière alternative mise sur pied par les banques. Si cela se réalise, certains y verront un risque d’une trop grande concentration. Mais d’autres pourraient y voir la possibilité du début d’une régulation plus serrée des marchés financiers.