Totalement irrationnelle, obsessive, elle enferme ceux qui en sont affectés dans un monde schizophrénique avec des conséquences graves. Le problème, c’est que les conséquences négatives de cette maladie mentale ne touchent pas ceux qui en sont affectés, mais de tierces parties, en particulier les personnes les plus démunies !
L’autre problème, c’est que cette maladie se propage de façon massive par les ondes. Sylvain Gouz, journaliste à Rue89, explique : « À force d’entendre à longueur d’ondes radio ou télé que le déficit c’est le diable, à force de subir les discours de droite et hélas parfois de gauche – il faut faire sérieux – serinant que la priorité, c’est de diminuer les dettes publiques, les Français finissent par le croire. » Et de fait, les Français seraient 82% à se dire inquiets à propos du déficit public et de la dette ! Ils ne comprennent pas que la rigueur budgétaire, dans le contexte actuel de ralentissement économique, ne peut que provoquer ce que tous veulent éviter : une autre récession.
Il semble pourtant évident que c’est plutôt le temps d’appliquer une politique contra-cyclique, qui admet une priorité aux mesures qui peuvent favoriser la croissance. Comme, par exemple, le plan anti-crise de Martine Aubry, candidate socialiste à la présidentielle de l’an prochain en France.
« La France souffre d’un triple déficit, déficit de finances publiques, déficit d’emploi, déficit de compétitivité. S’attaquer à l’un, sans les deux autres est une impasse. Il n’y a pas de temps à perdre. Aussi je propose trois mesures immédiates : pour réduire l’endettement, supprimer 10 milliards de niches fiscales sur les 70 milliards créés depuis 2002 ; en parallèle, pour relancer la croissance, baisser à 20% l’impôt sur les sociétés qui réinvestissent notamment les PME et le monter à 40% pour celles qui privilégient les dividendes ; enfin, financer un plan d’action pour l’emploi des jeunes en supprimant les subventions absurdes aux heures supplémentaires [la politique de Sarkozy qui a défiscalisé les heures supplémentaires] qui bloquent les embauches dans un pays qui souffre du chômage. »
Aux États-Unis, l’épidémie de la rigueur budgétaire s’est propagée comme une traînée de poudre chez la droite. Devant les effets schizophréniques extrêmes qui sont apparus sur certains individus, on a même vu un ancien économiste des administrations Reagan et Bush, Bruce Bartlett, s’obliger à écrire un article dans le New York Times pour essayer de ralentir la propagation. Dans le texte ‘Stop Obsessing About Debt’, il cite un analyste : « While our debt crisis is real and promises to grow to Frankenstein proportions in future years, debt is not the disease — it is a symptom. Lack of aggregate demand or, to put it simply, insufficient consumption and investment is the disease. » C’est d’une politique keynésienne classique de relance qu’il faut pour les États-Unis, non la rigueur budgétaire. Plutôt que mettre à pied des centaines de milliers d’emplois publics, comme ils l’ont fait ces dernières années, le pays a besoin d’une politique agressive d’emplois publics.
Et les États-Unis peuvent même y arriver sans hausser la dette. Le maire de New York l’admettait récemment : comparé aux autres pays, les États-Unis ont un très faible fardeau fiscal, appelant à une plus généreuse ponction des plus fortunés du pays. Selon le Center for American Progress (allez y voir les 10 graphiques qui prouvent la faiblesse de leur fardeau fiscal), les revenus fiscaux des États-Unis sont à leur plus bas depuis 60 ans, sous les 15 % du PIB. Ce serait la première fois depuis la deuxième guerre que cela arrive trois années de suite. Pour comparaison, la moyenne des pays de l’OCDE est de 25 %.
Une étude réalisée par l’Institute for Policy Studies (IPS) affirme que si l’imposition des ménages et des entreprises dont les revenus nets dépassent 1 million $ était aujourd’hui identique aux taux en vigueur en 1961, la dette étatsunienne disparaîtrait en une décennie. Le Trésor étatsunien pourrait en effet collecter 716 milliards $ supplémentaires par année…
Mais la cupidité actuelle de la majorité des riches est telle, que rien ne les feront plier.
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