S’il y a un pays où les « indignés » auraient toutes les raisons du monde pour manifester dans les rues leur indignation, c’est bien les États-Unis. Indignation contre 30 ans de politiques qui ont conduit le pays à un niveau intolérable d’inégalités ; indignation contre l’avidité sans limite de la classe des hyper-riches ; indignation contre un président qui les a trompés, etc., etc. Mais les États-Unis sont aussi le pays où le matraquage idéologique des médias et autres institutions idéologiques est le plus systémique. Il faut donc se réjouir du fait que, depuis quelques jours, un tel mouvement s’organise là où il devait nécessairement se produire : à Wall Street.
Le mouvement Occupy Wall Street qui a débuté le 17 septembre dernier a débouché en fin de semaine dernière sur une première vague d’arrestation massive : autour de 700 personnes en une seule journée. Il est intéressant de faire un lien, ici, avec le mouvement de désobéissance civile qui a récemment conduit à l’arrestation de près de 1 300 personnes sur les marches de la Maison Blanche pour s’opposer au projet écologiquement criminel du pipeline Keystone. En cette fin de 2011, alors qu’il devient de plus en plus évident que le American Way of Live se défait en lambeau sous l’assaut d’une multitude de forces incontrôlables, quelque chose est en train de se produire dans le mouvement de contestation. Pourtant, alors que n’importe quel péquenot délirant qui prétend vouloir bruler le Coran va immédiatement faire les manchettes de tous les médias du monde, les évènements tels que Occupy Wall Street ou celui de désobéissance civile contre Keystone se limitent à l’espace des réseaux sociaux.
La persévérance des indignés, qui se présentent comme les 99 % de la population qui ne profitent pas de la croissance, devrait néanmoins leur donner de plus en plus d’appuis et de visibilité. CAinsi, cest grâce à des personnes comme l’actrice Susan Sarandon, Cornel West, professeur de philosophie et activiste, ou l’ancien gouverneur démocrate de New York David A. Paterson, qui ont été sur place, dans le Zuccotti Park du Liberty Square, pour appuyer les protestataires, que le New York Times y a envoyé un reporter le 30 septembre.
Avant les arrestations de la fin de semaine dernière, les appuis commençaient d’ailleurs à se multiplier : Noam Chomsky leur a envoyé un message d’appui déclarant « Les protestations honorables et courageuses en cours à Wall Street devraient servir à porter cette calamité aux yeux du public […]. N’importe qui tenant les yeux ouvert sait que le gangstérisme de Wall Street — des institutions financières en général — a causé des dégâts graves à la population des États-Unis (et au monde). Et devrait aussi savoir à quel point ce faisant il s’est accru en plus de 30 ans, en même temps que leur pouvoir dans l’économie a radicalement augmenté et leur puissance politique avec. Cela a mis en mouvement un cercle vicieux qui a concentré une richesse immense et avec elle le pouvoir politique dans un secteur minuscule de la population, une fraction de 1 %, tandis que le reste devient de plus en plus [précaire]… », dénonçant au passage l’immunité des financiers « Too big to jail ».
Le président de l’AFL-CIO, Richard Trumka, a également apporté son appui au mouvement des indignés de Wall Street lors d’un discours qu’il prononçait au Brookings Institution, déclarant qu’il allait encourager les syndicats membres de la centrale à descendre dans la rue pour dénoncer le pouvoir absolu des financiers et des multinationales partout où l’occasion se présentera. Il faut comprendre que le mouvement s’est délocalisé en s’étendant dans toutes les villes où les institutions financières sont regroupées sur des places d’affaires majeures : après New York, Boston, Chicago, etc. (Voir la carte ici)
On peut lire dans le billet suivant la lettre ouverte aux médias de Marc Adler, au nom des indignés de Wall Street, traduite par les bons soins du site la revuedesressources.org.
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