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Le samedi 23 avril 2022

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Les Rencontres du Mont-Blanc : les avancées politiques

Envoyé spécial aux Rencontres du Mont-Blanc

Certaines rencontres internationales sont tellement bien planifiées que tout est prévu dans le détail. Et prévisible! On se demande à la fin si l’évènement méritait le déplacement. D’autres ne sont que des mises à plat par des échanges sur les pratiques. On y trouve son compte comme dans un grand centre d’achat car on s’y fait quelques amis de plus en consolidant son lobby habituel. Mais on reste généralement sur sa faim en se disant : oui mais quel horizon commun? Quel projet commun? Çà n’a pas été le cas de la 5e édition des RMB car elle a eu ses moments forts appuyés par une ambition commune : endiguer le capitalisme, neutraliser son caractère dominant, penser des alternatives. En effet la 5e édition s’est organisée de manière à dessiner les contours d’un projet sociopolitique et international: de grands chantiers prioritaires d’intervention, un cahier d’une vingtaine propositions qui mettent en perspective dans un avenir pas trop éloigné les choses qui doivent changer. Cette 5e édition des RMB méritait donc vraiment le détour. Elle a fait la différence! L’enjeu politique de Rio+20 y était, à coup sûr, pour beaucoup mais quand même! Itinéraire de cette rencontre internationale pas comme les autres par ces avancées politiques.

La présence de Pauline Green, présidente de l’Alliance coopérative internationale (ACI)

Première surprise, la présence de Pauline Green, la présidente de l’Alliance coopérative internationale (ACI). Pauline Green illustre bien le renouveau de l’ACI : première femme élue à la présidence (au congrès de 2009) de ce mouvement international qui représente quelques 200 organisations nationales actives dans une centaine de pays, elle fait bouger les lignes depuis sa nomination. En faisant adopter par l’ONU que 2012 devienne l’année internationale des coopératives, l’ACI a ainsi pris la décision d’un virage vers une présence plus vigoureuse dans l’espace public en se disant que désormais son influence se ferait non seulement au plan économique mais également au plan politique. Premier geste politique de Pauline Green : l’ouverture d’un bureau à New-York pour être au plus près de ce qui se passe à l’ONU. Deuxième geste : l’ACI organise son déplacement de Genève vers Bruxelles pour être au cœur de ce qui se passe dans l’Europe d’aujourd’hui.

C’est ainsi que dans son exposé aux RMB, elle n’a pas hésité à ouvrir l’espace de collaboration de l’ACI avec les RMB disant très clairement qu’il faut aller vers un agenda commun ACI/RMB. Elle n’avait pas hésité non plus à plonger, il y a quelques mois, dans la marmite du projet de Sommet international des coopératives que le mouvement Desjardins se proposait de mettre de l’avant. Pourquoi tout çà? Très précisément, nous disait-elle, parce qu’«en ces temps de cynisme, le mouvement coopératif fait partie de ceux qui ont quelque chose à offrir aux communautés, au Nord comme au Sud», qu’on le sait malheureusement peu et surtout «que les 20-25 prochaines années seront décisives pour la planète à tout point de vue».

La présence de Desjardins et de son projet de Sommet international des coopératives en 2012

Deuxième bonne surprise le lendemain, Desjardins, par l’intermédiaire de la responsable de la programmation du dit projet de Sommet, a accepté l’invitation des RMB à venir en parler au nom de la pdg du mouvement, Mme Leroux. D’entrée de jeu Joanne Lechasseur, annonce les couleurs : le pouvoir des coopératives est méconnu, le mouvement coopératif a un poids économique certain mais demeure un nain politique, l’économie internationale évolue dans la monoculture, elle doit mettre de l’avant la «biodiversité». «Il faut que le mouvement coopératif serve de contrepoids pour et avec tous ceux qui veulent plus de démocratie et plus d’entreprises socialement responsables» nous disait-elle. Elle n’hésitera pas non plus à compléter en fin de présentation que les 1500 dirigeants des coopératives et de mutuelles à travers le monde qui seront à Québec et Lévis en octobre prochain seront invités à lui donner suite de façon «à favoriser la récurrence de ce type d’initiative». Qu’on se le tienne pour dit, ce ne sera pas un évènement sans lendemain. Un peu plus tôt, Gérald Larose, porte-parole québécois des RMB, parlait dans des termes similaires en affirmant que l’heure est plus que jamais à «peser d’un plus grand poids, par l’ESS, sur l’avenir économique et social de la planète. Mais pour ce faire, cela doit s’organiser à toutes les échelles, du local à l’international».

Le coup de tonnerre d’un ancien premier ministre socialiste français, Michel Rocard

La troisième bonne surprise fut sans doute l’ancien premier ministre socialiste, Michel Rocard, qui donna son aval au document d’orientation des RMB en en dégageant quelques-unes de ses découvertes. «Si j’ai bien compris, vous voulez changer la donne mondiale avec l’économie sociale. Le projet est d’une ampleur mondiale, c’est un pas en avant considérable». Et d’ajouter : «Une autre de mes découvertes fut de constater que vous voulez donnez sa chance à cette économie populaire du Sud, l’aider à grandir, elle qui fait vivre plus d’un milliard de personnes sur la planète». Et puis «vous vous êtes pris à penser devenir alternatifs au capitalisme», à ce capitalisme qui laisse sur le bord du chemin «plus de 30% de la population mondiale affectée directement par le chômage, la précarité, la pauvreté». Enfin, ajoute-t-il, «après vous avoir un peu perdu de vue depuis 30 ans, je constate que votre capacité de proposition a fait un pas de géant». Et d’inviter tous et chacun des 250 dirigeants présents à presser le pas étant donné l’urgence sociale et écologique actuelle. «L’état actuel du monde exige d’être des vainqueurs». Rio+20 va peut-être être un échec car «le marché financier occupe tout le terrain par les temps qui courent». D’où «le devoir d’offensive de l’économie sociale et solidaire, le devoir d’exprimer autre chose. Sa droiture et son efficacité sont là pour le démontrer». Et de terminer en disant que le fond de la crise dont on ne parle jamais, c’est la précarité. «La pensée monétariste a effacé le travail comme référent premier de l’économie. Il faut le rappeler et se mobiliser à cet effet car la force syndicale ne sera pas suffisante à résoudre cette crise-là. Vous n’avez donc pas le droit d’être timides ni de travailler en solo chacun dans vos pays».

(Suite et fin demain)

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