Les politiciens de droite, même lorsqu’ils se disent pour le changement, sont plus souvent qu’autrement des opportunistes prêts à mettre la santé publique en danger pour aller chercher des votes. Suite à des informations concernant la possibilité de taux de cancer plus élevé des riverain de la centrale Gentilly-2, François Legault affirme « Il n’y a aucune relation directe entre la centrale et les problèmes de santé des gens », alors que Jean Charest proclame qu’aucune information l’amène à s’interroger sur la relance de la centrale pour les 25 prochaines années. Les deux disent avoir un « préjugé favorable » pour la réfection.

Pourtant, en début d’année, le ministre de l’Environnement, Pierre Arcand, laissait lui-même croire que la réfection de la centrale nucléaire de Bécancour était peu probable étant donné le dépassement prévisible des coûts auxquels pourrait être exposer Hydro-Québec pour la réfection. Pour la centrale jumelle de Gentilly-2, celle de Point Lepreau au Nouveau-Brunswick, les dépassements de coûts ont été de 50%, soit l’équivalent d’un milliard $, sinon plus. Et à la même époque, Louis-Gilles Francoeur nous apprenait que, selon une analyse du physicien nucléaire Michel Duguay, la centrale nucléaire ne pourrait résister à un tremblement de terre de force 5 à 7 sur l’échelle de Richter (force modérée à forte) s’il survenait à proximité et près de la surface. Plutôt inquiétant !

Malgré le fait que la population locale soit prête à n’importe quoi pour garder ces fameux 800 emplois bien payés, le Québec doit avoir le courage de faire un choix différent. D’autant plus que les avantages du scénario de démantèlement de la centrale sont loin d’être négligeable pour la région de Bécancour, comme le signale François A. Lachapelle, évaluateur agréé retraité d’Hydro-Québec. Comme pour l’énergie fossile, le Québec a tout à gagner de faire le plus rapidement possible le choix des énergies vertes pour relancer l’économie québécoise sur le long terme puisque c’est surtout l’économie ontarienne qui profite de la filière nucléaire.

Ailleurs dans le monde, plusieurs pays font maintenant ce choix. Prenons l’Allemagne. Ce pays entreprend le plus vaste plan de développement depuis la 2e guerre en investissant 263 milliards $ dans les énergies propres. Encore plus important que le Plan Marshall et la reconstruction du pays après la 2e guerre, le consensus solide des Allemands autour de la volonté de fermer les 17 centrales nucléaires du pays d’ici 2022 (20% de la consommation électrique) représente un appui incontestable pour accélérer le virage vert. Les investissements dans les projets d’éoliennes offshore vont représenter à eux seuls l’équivalent de 8% du PIB. Le pays va devenir l’un des plus grands laboratoires de développement de l’énergie éolienne. Les entreprises qui étaient anciennement dans le nucléaire, plutôt que faire obstacle au changement, planifient une reconvertion à l’éolien.

Le choix allemand découle, certes, d’un vaste mouvement social contre les risques du nucléaire sur l’environnement et la santé. Mais d’un point de vue économique, ce choix n’est pas sans fondement. Avec les avancées technologiques dans les énergies renouvelables, le choix de la filière nucléaire conduit à un risque économique majeur. Selon une analyse du World Watch Institute, les coûts de plus en plus élevé de l’énergie nucléaire devrait conduire, dans le long terme, à une rémission plutôt qu’à une relance durable de l’industrie. Les coûts d’immobilisation du capital des centrales croissent de 15% par année alors que le prix de l’uranium devrait doubler à brève échéance. Donc les Allemands font un choix très pragmatique sur le long terme. C’est ce que nous devons aussi faire.