Développer une économie verte au-delà du capitalisme vert, est-ce pensable ? C’est non seulement pensable, mais des initiatives se manifestent par milliers un peu partout sur la planète. De plus en plus de mouvements prennent acte de l’urgence écologique au Québec et ailleurs dans le monde : gaz de schiste ici, biodiversité menacée là, réchauffement climatique de plus en plus menaçant… La recherche de solutions non capitalistes à ces problèmes se fait active, et des pratiques, des stratégies, des politiques de transition écologique de l’économie émergent. Car, contrairement à ce que l’habitude nous empêche d’envisager, l’économie peut être au service de la société. Pour ce faire, des mouvements, des communautés et des régions s’engagent directement sur le terrain de l’économie tout en négociant avec leur État pour qu’il favorise des politiques publiques conséquentes.
Louis Favreau et Mario Hébert (un sociologue et un économiste), se nourrissant des réflexions émises dans le cadre du Forum international des dirigeants de l’économie sociale et solidaire (FIDESS) et au sein des organisations québécoises qui en sont membres, nous présentent des analyses et des propositions pour agir dès maintenant en matière de conversion écologique de l’économie. Ils rendent également compte des plus récentes recherches sur ce thème. Leur livre intéressera tout autant les militants, les dirigeants et les professionnels des mouvements sociaux que les chercheurs et les enseignants en organisation communautaire, en développement régional et, plus généralement, en sciences de l’environnement de même qu’en sciences économiques et sociales.
La 5e édition des Rencontres du Mont-Blanc organisée en France à l’automne 2011 par le Forum international des dirigeants de l’économie sociale et solidaire (FIDESS) portait sur l’Économie sociale, un nouveau modèle de développement. Les auteurs ont eu l’idée de produire un livre à partir du document d’orientation qu’on leur avait demandé de réaliser pour les fins de cette 5e édition. Cette rencontre internationale a réuni pendant trois jours 250 dirigeants de coopératives, de mutuelles et d’associations à vocation économique de par le monde et provenant tant de pays du Sud que du Nord. Le Québec n’était pas en reste : une délégation d’une trentaine de personnes y étaient dont la Caisse d’économie solidaire Desjardins, Fondaction, le GESQ, le mouvement Desjardins, le CQCM, SOCODEVI, Équiterre, le Fonds québécois pour le développement durable (FQDD)…
Cette rencontre aura été une réussite grâce notamment à la qualité des échanges sur un cahier de propositions politiques adossées à cinq chantiers prioritaires dans la perspective de préparer Rio+20, le Sommet de la Terre. Le tout aura servi de base à une présentation à des chefs d’État à New York en mars dernier.
L’ouvrage prolonge donc cette conférence et la réunion québécoise qui l’avait précédé de quelques semaines (le 17 octobre 2011 au Centre Saint-Pierre à Montréal) : On change de modèle. Contribution de l’économie sociale et solidaire au développement durable. Il prolonge aussi celle du rendez-vous solidaire du 26 avril 2012 à Joliette. Il s’imposait en effet de laisser des traces écrites approfondissant ce sujet crucial de la crise écologique et du développement durable tant au Québec qu’à l’échelle internationale en s’inspirant de l’entrée théorique de l’écologie politique (par Alain Lipietz) et en faisant valoir qu’il existe des alternatives autres que celles avancées par le secteur privé. Tout comme celui qui l’a précédé (Favreau et Molina, 2011), cet ouvrage se veut aussi une contribution pour une meilleure connaissance des enjeux actuels du Québec et de la planète (inséparablement liés), une proposition sur les visées stratégiques de renouvellement de notre «modèle» de développement et une invitation à renouveler les formes de solidarité internationale à déployer entre mouvements en ces temps d’incertitude. Bref une réflexion sociale, scientifique et critique liée à l’avancement du Québec dans le cadre d’une mondialisation équitable.
D’entrée de jeu, l’ouvrage avance « qu’on ne travaille pas à changer le monde aujourd’hui comme on le faisait en 1980. Car dans les 30 dernières années, nous avons assisté à un véritable renversement du monde. Et il n’y a aucun signe d’accalmie à l’horizon. » Et d’ajouter que « si on veut donner un peu plus de profondeur à la mobilisation pour une économie plus démocratique, plus écologique et plus solidaire dans l’avenir, que se soit celle du mouvement coopératif et de l’économie sociale et solidaire en général (ESS), celle de mouvements comme le syndicalisme des travailleurs, les organisations paysannes, les groupes écologistes ou celle des organismes de coopération internationale (OCI), il faut prendre acte des différences profondes qui marquent les 30 dernières années par rapport à la période antérieure, celle des 30 glorieuses (1945-1975) ». Et il faut se placer aujourd’hui plus qu’hier dans une perspective internationale et de conjoncture longue. À partir de là les chapitres se déploient de la façon suivante :
1. Les trois dernières décennies : le basculement du monde
a) La montée en puissance de la financiarisation du capitalisme
b) La fin des communismes
c) Le retour des religions et surtout des fondamentalismes religieux
d) Deux décennies sur trois perdues pour le développement du Sud
e) L’urgence écologique
2. Crise du modèle économique dominant : le virage écologique est en voie de s’imposer
a) La crise du capitalisme : la plus grande menace est écologique
b) De Rio 1992 à Rio 2012 : itinéraire, écueils, avancées en matière de DD
c) Sommes-nous condamnés à produire toujours plus? L’enjeu de la transition écologique
d) Développement durable : une percée dans les institutions et les mouvements
3. L’économie sociale et solidaire, une force de transition de l’économie au Nord comme au Sud
a) Le parcours des coopératives et de l’ÉSS dans le monde
b) Économie populaire et solidaire au Sud
c) L’économie sociale au Nord
d) L’ÉSS aujourd’hui : innovations, impact sur les territoires, ouverture aux enjeux de défenses des écosystèmes
e) 5 grands chantiers et 20 propositions
4. Énergie et climat : les alternatives sont déjà là
a) L’enjeu énergétique et climatique
b) La recherche d’alternatives : quelques scénarios d’une stratégie d’indépendance énergétique
c) Propositions générales pour renouveler les politiques publiques
5. Agriculture et aménagement des forêts : un virage écologique est en cours
a) L’enjeu de l’agriculture et de l’aménagement des forêts
b) Des réalisations au Québec et dans le monde d’une économie verte et solidaire
c) Propositions pour renouveler les politiques publiques
6. Des États et territoires socialement et écologiquement responsables
a) L’enjeu du renouvellement des États et de leur rapport aux communautés
b) L’économie solidaire au cœur de réalisations innovatrices au double plan social et écologique
c) Propositions pour renouveler les politiques publiques
7. Faire mouvement : la dynamique internationale des coopératives et de l’économie solidaire
a) Coopératives et économie solidaire interpelées par la crise
b) Le mouvement coopératif et le renouveau de l’Alliance coopérative internationale
c) Cette mouvance influence-t-elle la marche générale de l’économie dans le monde?
d) Faire mouvement avec Rio +20 : comment?
Le livre sera lancé au Sommet international des coopératives à Québec le 9 octobre en fin de journée et à l’Assemblée générale de Fondaction le samedi 13 octobre à Montréal. Disponible en format papier ou numérique dès maintenant en s’adressant aux Presses de l’Université du Québec ou à votre librairie préféré.
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