L’auteur invité est Jacques Dagenais, intervenant privé à Gentilly-2 depuis 1999.
L’élection d’un gouvernement minoritaire du Parti québécois vient de sonner le glas de la centrale atomique de Gentilly-2 et annonce la fin immédiate au Québec de la désastreuse aventure nucléaire.
Cependant, cette sortie du nucléaire ne peut se faire dans un tour de clé comme lors d’une fermeture d’usine ou de centrale thermique ; la fermeture de Gentilly-2 va demander la mise en place d’un plan d’action sur quelques décennies et représentera des coûts importants.
Il va falloir procéder à la gestion et à l’évacuation des trois mille tonnes de combustible irradié, démanteler la centrale et restaurer le site.
La façon la plus harmonieuse d’y arriver sera la création, un peu comme en Angleterre, d’un organisme qui sera responsable de superviser toutes ces opérations de déclassement de la centrale.
Hydro-Québec devrait sortir immédiatement Gentilly-2 de ses livres par un transfert de propriété de la centrale vers cet organisme avec la provision d’environ 700 millions de dollars qu’il y a présentement aux livres de la société d’État pour cette fermeture.
Le gouvernement assurera au cours des ans les flux monétaires supplémentaires nécessaires pour effectuer l’opération. Cela enlèverait l’obligation à Hydro-Québec de prendre une charge de 1,5 à 2 milliards de dollars dans le trimestre où une telle annonce serait faite.
Cet organisme, un genre de secrétariat atomique québécois ou Société québécoise de déclassement de sites nucléaires (SQD) serait dans une position unique pour créer à Gentilly un centre d’excellence en déclassement nucléaire. En effet, la petite centrale Gentilly-1, qui a fonctionné à peine une centaine de jours, est en dormance depuis environ 40 ans.
Son niveau de radioactivité est assez réduit pour que l’on commence le démantèlement. Comme elle appartient au gouvernement fédéral et que celui-ci l’a désignée comme l’un des sites nucléaires canadiens à restaurer avec accès au fonds monétaire approprié, la SQD pourrait obtenir d’Ottawa ce contrat de démantèlement qui permettrait de développer une expertise dans ce domaine.
Le développement de cette expertise permettra non seulement de maintenir un niveau d’emploi plus important, mais aussi de réduire les coûts nécessaires pour démanteler Gentilly-2 et offrir un contexte de travail beaucoup plus sécuritaire pour les travailleurs et la population environnante.
Avec une centaine de centrales qui arriveront bientôt à la fin de leur vie aux États-Unis, au coût unitaire d’environ un milliard de dollars uniquement pour leur déclassement, le combustible irradié étant la propriété du gouvernement américain, on voit donc que c’est une industrie de près de 100 milliards de dollars qui va se développer et où l’on pourra avoir une longueur d’avance grâce à Gentilly-1 si l’on joue bien nos cartes.
Quelle que soit la stratégie retenue pour procéder au déclassement de Gentilly-2 et pour mettre en place un plan de gestion à long terme du combustible irradié, elle devra être transparente et obtenir un vaste appui populaire.
L’annonce de la sortie du nucléaire devrait créer un climat favorable à une large acceptation sociale d’un plan bien présenté.
La création de la SQD pourrait contribuer largement à l’instauration d’un tel climat favorable tout en retirant des livres d’Hydro-Québec ce boulet économique sans pour autant imposer une charge immédiate au gouvernement qui pourra étaler les dépenses supplémentaires sur vingt ou trente ans.
Même si l’arrêt du réacteur et le retrait du combustible du coeur du réacteur vont diminuer de beaucoup les risques et l’ampleur d’un désastre atomique éventuel à Gentilly, tant qu’une solution acceptable pour l’évacuation des 3000 tonnes de combustible irradié qui y sont accumulées ne sera pas trouvée, le risque de contamination va demeurer élevé.
Un tel organisme pourrait assurer à la population que les opérations qui risquent d’impliquer des mouvements de matières dangereuses se feront en respectant des normes de sécurité les plus élevées.
Le personnel d’opération demeurerait employé par Hydro-Québec, qui deviendrait un sous-traitant de la SQD dont le conseil serait composé de représentants gouvernementaux ou d’Hydro-Québec, d’écologistes et d’experts indépendants. Une toute petite équipe serait nécessaire pour assurer le fonctionnement de cette société.
Pour lire le texte original, on va sur le site du Devoir.
[...] fois la décision prise, le démantèlement d’une centrale nucléaire est une opération complexe comme l’explique bien Jacques Dagenais, un intervenant privé de longue date à Gentilly-2. Il y en a pour plusieurs décennies car « on ne sort pas du nucléaire comme on sort d’une [...]