L’industrie des gaz de schiste a passé un été difficile aux États-Unis. Pas à cause de la canicule, mais en raison des nombreuses études et scandales qui ont continué à démontrer les impacts négatifs de l’industrie. D’autant plus troublant que le lobby de l’industrie presse les législateurs de leur donner le feu vert pour qu’ils puissent augmenter les exportations de gaz naturels, aggravant ainsi les impacts sur les communautés touchés par l’exploitation.
Selon l’EPA (l’Agence de protection de l’environnement), ce serait plus de 2 milliards de gallons (8 milliards de litres) d’eau contaminé qui, quotidiennement, doivent être traité dans la foulée des injections de 144 000 puits d’exploitation. Selon une étude parue en août, le potentiel de risque de contamination s’élèverait à 200 mètres cubes de fluide contaminé pour chacun des puits. Les risques sont à ce point inquiétant que Wells Fargo, l’un des géants bancaires étatsuniens, a annoncé que dorénavant il refusait d’hypothéquer des maisons situées à proximité des puits de gaz de schiste. D’autre part, la compagnie d’assurances Nationwide Mutual Insurance refuserait quant à elle de couvrir des dommages qui pourraient être occasionnés par la fracture hydraulique. Motif : l’exposition aux risques est trop élevée pour être ignorée. Pourtant l’industrie du gaz répète qu’il n’y a aucun risque…
Une étude plus pointue réalisée au Texas (l’un des hauts lieux de l’exploitation des gaz de schiste) démontre par ailleurs les liens réels qui existent entre l’utilisation de la méthode de fracturation et l’activité sismique. « You can’t prove that any one earthquake was caused by an injection well, affirme l’étude, but it’s obvious that wells are enhancing the probability that earthquakes will occur. ». L’automne est à peine commencé que l’industrie continue à faire les manchettes pour ses pratiques questionnables. Le plus récent en date est celle de la controverse autour de la State University of New York (SUNY) de Buffalo. Au cours des cinq dernières années, cette université publique a vu son financement public être réduit de 1,4 milliard $ en raison de la crise des finances publiques. Il n’en fallait pas plus pour que l’industrie du pétrole et du gaz profite de la situation et utilise son argent ‘sale’ pour combler les coffres vides de l’université. Ce qui est en train de devenir le scandale de la SUNY découle du fait que les chercheurs de l’université sont maintenant appelés à s’associer à l’industrie dans des études envers lesquelles ils n’ont plus aucune indépendance. La communauté universitaire a dû monter aux barricades pour dénoncer cette dangereuse déviation de la mission de la SUNY.
Mais les pratiques déloyales de l’industrie ne s’arrêtent pas là. En octobre a aussi éclaté le scandale des pratiques d’intimidation contre ceux qui osent condamner les impacts environnementaux de l’industrie des gaz de schiste. La guerre psychologique pour faire taire les critiques, qui sont comparés à des ‘insurgés’, s’inspire du manuel de l’armée des États-Unis pour les opérations de contre-insurrection, aussi appelé le ‘Donald Rumsfeld’s book’. L’industrie aurait peaufiné ses méthodes de guerre psychologique l’an dernier contre les opposants aux gaz de schiste en Pologne (voir mon billet de la semaine dernière). L’industrie aurait espionné les mouvements sociaux contre les gaz de schiste et donné des informations privilégiées au gouvernement polonais (favorable au développement de l’industrie).
Pour terminer cette brève revue, j’aimerais aborder la question de l’aide publique au développement des nouvelles technologies. On associe très souvent cette aide publique aux nouvelles technologies propres, en particulier aux énergies renouvelables. L’industrie du pétrole et du gaz ne manque d’ailleurs jamais une occasion pour dénoncer cette aide, finançant à tour de bras les politiciens qui proposent d’abolir toutes formes de subventions à ces énergies vertes. Or, une étude dévoilée en septembre montre qu’entre 1980 et 2002 la technologie de la fracturation aurait reçu autour de 10 milliards $ en financement de toute sorte pour se développer. Autrement dit, l’industrie des gaz de schiste n’aurait jamais vu le jour sans cette aide. Mais aujourd’hui ils ont le culot de s’opposer avec arrogance et véhémence au financement des énergies propres.
La semaine prochaine, dans le dernier billet de cette série, on fait le point sur le Canada.
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