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Le samedi 23 avril 2022

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Rigueur et relance (2) : choisir l’audace

Nous avons vu dans le billet précédent qu’il est de plus en plus évident que l’austérité ne constitue pas la meilleure politique à suivre en prévision de la récession mondiale qui pointe son nez à l’horizon immédiat. Une baisse drastique des dépenses publiques ne constitue pas une solution; elle dramatise plutôt le problème. Au lieu de chercher à réduire à court terme à n’importe quel coût le déficit public, signale le directeur de la recherche à l’OFCE, il faut laisser l’économie revenir dans une zone de fonctionnement où les multiplicateurs sont plus faibles, ou en d’autres mots reporter l’ajustement budgétaire à un moment où le chômage sera significativement réduit pour que la restriction budgétaire puisse produire son effet.

Mais c’est justement ce qu’a fait le Québec pendant et après la crise de 2008-2009, ce qui nous a permis de passer à travers cette crise, à toute fin utile, de façon exemplaire. Et cet exemple est à ce point pertinent puisqu’il a été réalisé malgré un environnement où la collusion et la corruption entre entrepreneurs, mafia, fonctionnaires et PLQ ont aggravé les coûts de la relance d’un 20% supplémentaire. Nous comprenons aujourd’hui, grâce à la Commission Charbonneau, que cet ambitieux plan d’infrastructures publiques du gouvernement Charest permettait en même temps d’enrichir les coffres du PLQ et des amis du régime. Tout s’explique maintenant : ce sursaut soudain pour améliorer les infrastructures, à la suite de l’effondrement du viaduc du Souvenir, faisait l’affaire de bien des gens.

Aujourd’hui, dans un contexte économique qui préfigure une situation similaire à celle de 2008, mais dans un contexte politique tout à fait différent, le gouvernement du Québec devrait s’inspirer de cette politique de relance de 2008-2011, mais en agissant cette fois dans l’intérêt public. Entre un PLQ complètement discrédité et des caquistes qui appellent à une austérité aveugle, nous pensons que le gouvernement Marois doit choisir l’audace de renouveler le modèle québécois en misant sur la mobilisation du Québec autour du projet de reconversion écologique de l’économie québécoise, en misant en priorité sur un plan de mobilité durable, sans négliger pour autant des efforts de rigueur dans l’efficacité de l’État québécois (les propositions qui suivent s’inspirent des propositions d’un rapport qui sera bientôt lancer par l’IREC).

Plus de rigueur

Après 10 ans de médecine libérale, il est plus que probable que le dégraissage de l’État a déjà été réalisé. En fait les problèmes de collusion et de corruption que nous connaissons depuis quelques années démontrent que ce dégraissage a été trop loin et qu’il faudrait maintenant ‘remuscler’ l’État, puisque c’est du muscle qu’il faut lui redonner. Les efforts de rigueur dans l’efficacité de l’État québécois doivent passer par un nouveau cycle de renforcement de la fonction publique, en particulier dans les fonctions de planification et de surveillance des dépenses publiques. Nous avons perdu une partie de cette expertise qui a été utilisée par le privé pour frauder l’État.

Diminuer les dépenses en infrastructure

Nous pensons que le Québec pourrait diminuer ses dépenses dans les infrastructures de 20% sans diminuer pour autant ses projets. Le plan de rigueur dont nous avons besoin doit prioritairement permettre de diminuer les surcoûts entraînés par la collusion et la corruption. Mais le gouvernement doit aussi cesser le développement de nouvelles routes, comme le réclame TRANSIT. Le tiers des dépenses sont présentement allouées à de nouveaux projets routiers. C’est trop ! L’urgence est à l’entretien des routes existantes et au développement d’un réseau de transport collectif ambitieux et performant. Dans cette optique, le gouvernement doit assurer une meilleure intégration des transports en commun sur le réseau routier en ajoutant des voies réservées pour les autobus, les taxis, le covoiturage et les véhicules éco-énergétiques.

Pour une mobilité durable

L’avantage que nous avons présentement, c’est que nous devons mettre en œuvre un ambitieux programme de réfection de nos infrastructures et des équipements de transports construits dans les années 1960 et 1970, mais d’avoir un réseau routier qui a atteint une certaine maturité, n’exigeant plus de nouveaux développements majeurs. Nous avons donc l’opportunité d’en repenser les missions et les utilisations. À cet égard, il est temps d’amorcer un virage important vers un nouveau paradigme de transport, celui de la mobilité durable. Au Québec, 73 % de notre consommation de produits pétroliers énergétiques est associée au secteur des transports. Un plan de reconversion écologique de l’économie passe prioritairement par une stratégie en faveur de la mobilité durable. Et c’est d’autant plus vrai que les innovations dans le domaine de la mobilité durable sont, avec celles sur les énergies renouvelables, les principaux axes autour desquels va s’exprimer la prochaine révolution industrielle.

Dans le contexte d’une probable récession mondiale, le lancement d’un ambitieux plan de reconversion permettrait de faire ce que je proposais au début de ce billet, soit reporter le nécessaire ajustement budgétaire à un moment où le chômage sera significativement réduit pour que la restriction budgétaire puisse produire son effet. Dans les prochaines semaines je reviendrai avec plus de détails sur ce plan de reconversion, dont des éléments seront dévoilés par l’IREC et qui constitueront également l’un des thèmes du prochain numéro de la Revue vie économique.

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