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Le samedi 23 avril 2022

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Coopératives et développement durable aux États-Unis : une agréable surprise

Par les temps qui courent je suis aux États-Unis. Malgré le flot continue d’imbécilités républicaines qui traînent dans bien des médias avec en prime les émissions poubelle de FOX News qui crachent leur mépris de tout ce qui peut le moindrement bouger à gauche, on réussit à avoir quelques nouvelles rafraîchissantes. Celle-ci notamment : le succès d’une grande coopérative d’équipement de plein air, grande cousine de Mountain Equipment Coop (MEC) au Canada. Rappelons que cette dernière, fondée en 1971 à Vancouver, a aujourd’hui un chiffre d’affaires annuel de $261 millions et dessert 3,3 millions de membres à travers le pays depuis 2003 avec quelques 16 magasins dont quatre au Québec soit deux à Montréal, un à Québec et un autre à Longueuil.

Une grande coopérative de consommation investie dans le développement durable

En ce qui concerne la Recreational Equipment Inc. (REI), pour donner un ordre de grandeur, c’est presque 10 fois la MEC. Elle est une des plus grandes coopératives de consommateurs des États-Unis avec 127 magasins dans 31 États. L’entreprise emploie près de 10 000 personnes dans ses magasins, a un chiffre d’affaires de $1,8 milliards et est classée 8e parmi les 100 meilleurs employeurs des ÉU en 2011. Petite anecdote raconté sur le site de la MEC : avant 1971, les amateurs de plein air canadiens de Vancouver et des environs achetaient leur matériel en traversant la frontière pour acheter au magasin REI de Seattle.

C’est le journaliste et blogueur du New York Times (NYT), Timothy Egan, qui nous met sur la piste à partir d’un événement politique trop rare, la nomination par le président Obama de la directrice générale de cette grande coopérative, Sally Jewell. Une nomination, pas n’importe laquelle, mais bien celle d’être à la tête du Département de l’intérieur des États-Unis. Que fait ce Département de l’intérieur ? Rassurez-vous, l’«Intérieur», çà ne concerne pas la justice et la sécurité comme dans la plupart des pays européens mais bien la gestion et la préservation des terres appartenant à l’État fédéral à travers le pays (exception faite des réserves indiennes). Cela représente près de 20% du territoire américain : 476 barrages, 346 réservoirs d’eau, 388 parcs nationaux, des sites de bord de mer, 544 refuges nationaux d’animaux sauvages. Ajoutons-y que ces territoires appartenant à l’État fédéral génèrent 28% de l’électricité nationale.

Sous l’administration Bush, les «écolos» avaient la vie difficile. Les pétrolières et les gazières, elles, avaient la vie facile de dire le journaliste du New York Times : « Bush maid oil and gas drilling his No.1 priority for interior’lands ». Et d’ajouter qu’Obama n’avait pas fait grand chose pendant son premier mandat pour modifier la situation. Aujourd’hui, il semble se racheter, car c’est assez clairement une alliée des «écolos» qui vient d’être nommée.

Ingénieure de formation, elle a connu l’industrie pétrolière en faisant un stage pendant trois ans à Mobil Oil à sa sortie de l’université, puis a travaillé 19 ans dans le secteur bancaire (dont ses cinq dernières années dans une mutuelle d’assurance). Mais il semblerait que son attache à REI ait été plus forte puisque son père, immigré d’Angleterre dans les années 1950 aux É-U qui prend racine à Seattle, s’engage à fond dans le développement de cette coopérative mise au monde par des américains d’origine scandinave à la fin des années 1930. Sa fille sera de la partie, deviendra membre du Conseil d’administration de la coopérative en 1996 pour finalement prendre la tête de l’entreprise en 2000 en tant que pdg jusqu’à sa récente nomination politique début février. Elle est aussi vice-présidente de l’Association nationale pour la conservation des parcs.

Le loisir de plein air : une industrie qui génère trois fois plus d’emplois que les pétrolières

Bon ! Entendons-nous, elle ne fera pas de miracles mais le journaliste du New York Times ne se gêne pas pour dire que sa nomination va bel et bien de pair avec une industrie du plein air très florissante qui est responsable de 6.1 million d’emplois soit trois fois plus que les emplois générés par l’industrie pétrolière et gazière. Nombre d’Américains sont en effet friands de plein air dépensant 646 milliards de dollars par année pour ce type d’activités. Ici il faut évidemment avoir en tête que la population des É-U avoisine 330 millions d’habitants. Bref, les messages de l’industrie pétrolière et gazière passent moins bien quand on pense au nombre d’emplois créés dans le secteur récréatif et quand on sait que ceux et celles qui font ce type d’activités ne veulent pas les pratiquer dans des champs de pétrole et de gaz de schiste ou dans des rivières pollués.

Quand on voit les politiques de la MEC et de la REI, ce qu’elles préconisent et font au plan écologique du fait de la proximité de leur clientèle avec la nature, clientèle par ailleurs très urbaine et de classe moyenne mais qui fait du kayak, du vélo, du ski, de la marche en montagne, de la pêche, de l’alpinisme, du camping familial, des traversées de l’Amérique d’est en ouest ou du nord au sud en caravane et que sais-je encore, on se dit que le loisir de plein air est devenu autre chose. C’est devenu une industrie prospère qui aide certainement à freiner la déconnexion de notre monde moderne d’avec la nature. Et peut-être que cela aide aussi à freiner la montée en puissance des pétrolières et des gazières qui se foutent éperdument de la nature et des écosystèmes qui garantissent notre survie sur la planète.

Des coopératives qui s’inscrivent dans un mouvement plus général au plan international

Des coopératives comme la MEC et la REI y sont pour quelque chose. Dans le mouvement coopératif, le secteur du loisir de plein air rejoint à sa manière la mouvance de celles qui sont engagées dans les énergies renouvelables, dans l’agriculture biologique et/ou locale, de ces coopératives forestières engagées dans une transition écologique tout comme le font certaines grandes coopératives agricoles à l’exemple de Nutrinor (biomasse forestière, utilisation du train plutôt que du camionnage comme moyen de transport des marchandises…) et ainsi de suite. Cela devient d’autant plus captivant quand on sait que cela est en train de faire bouger les lignes d’un mouvement coopératif international en plein renouvellement face à la tripe crise que nous traversons qui est tout à la fois économique, écologique (alimentaire et énergétique) et sociale comme je le présentais il y a peu suite au premier Sommet du duo Desjardins/Alliance coopérative internationale.

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