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Le samedi 23 avril 2022

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Solidarité internationale : le virage écologique est-il en train de prendre forme?

Dans sa pièce maîtresse de Manchester l’automne dernier dont j’ai tiré l’essentiel dans un billet récent, l’Alliance coopérative internationale (ACI) traçe l’avenir de la prochaine décennie en disant ceci : « …bien qu’il existe quelques exceptions locales, actuellement le développement durable n’est pas un terme universellement associé aux coopératives. C’est ce qui doit changer d’ici 2020. » Je ne pense pas me tromper en disant que l’on peut faire le même constat parlant des organismes de coopération internationale (OCI) où tout un chacun est sympathique à l’idée d’un DD sous l’angle par exemple de la simplicité volontaire. Cependant, c’est sans en mesurer les conséquences politiques en termes de priorités dans les orientations et le travail à réaliser avec des communautés au Sud, le «social» occupant toute la place…ou presque. Mais cela est peut-être en train de changer….

Une dynamique québécoise qui ouvre de nouvelles portes au plan de la solidarité internationale

Dans cette perspective, la thématique qui ouvre un tournant et rapproche depuis peu certaines OCI des groupes écologistes a trait à la transition écologique de l’économie. Les dernières initiatives menées par le GESQ conjointement avec la Caisse d’économie solidaire Desjardins et Fondaction en 2011 et 2012 illustrent bien le propos. C’est ainsi qu’on retrouve nommément comme fil conducteur de la rencontre de Joliette en avril 2012 le diagnostic suivant : « La crise actuelle est une crise du modèle dominant de développement. Cette crise n’est ni accidentelle, ni temporaire. Elle est globale, c’est-à-dire tout à la fois et à la même hauteur, économique, sociale et écologique. Elle est aussi plus que jamais internationale par l’interdépendance accrue de la nouvelle phase de la mondialisation. Bref la planète n’y arrivera pas si on ne change pas de modèle ! Le 21e siècle sera celui d’une révolution écologique adossée à l’égalité sociale et à la transformation des dispositifs et formes de la démocratie de nos sociétés. Nous sommes à même de pointer les grands enjeux de la période actuelle qui sont: a) la crise de l’agriculture et de l’alimentation ; b) la crise de l’énergie et du climat ; c) l’affaiblissement de l’État social ; d) la faible diversité de l’économie et le fait que la finance soit aux postes de commande de cette économie ; e) une mondialisation néolibérale qui accentue les dépendances et les interdépendances. Dans la lignée de Rio 2012, l’économie sociale et solidaire doit se mobiliser pour cette nécessaire transition écologique au plan économique comme au plan politique. Le fil rouge commun : développer, par delà une vision environnementaliste, une vision politique de l’écologie. »

Dans la foulée de ce virage, la 7e édition de l’Université d’été du GESQ en mai prochain qui portera sur les défis de développement durable en matière d’agriculture et d’alimentation et 2014 qui sera, par résolution de l’ONU, l’année internationale de l’agriculture familiale met la question alimentaire, dans sa véritable dimension tout à la fois planétaire et de caractère stratégique pour réponse à la crise actuelle. Elle est plus que jamais à l’ordre du jour.

Mentionnons à cet égard qu’un premier virage est venu de là où on ne l’attendait pas. C’est le mouvement coopératif québécois qui a commencé le premier à donner l’exemple : des coopératives agricoles comme Nutrinor, des coopératives forestières (avec la biomasse de seconde génération http://www.oikosblogue.com/?p=9338), des coopératives d’énergies renouvelables (comme celle de Valéo dans l’éolien au Saguenay), la Caisse d’économie solidaire Desjardins avec sa politique de prêts incitatifs en matière d’efficacité énergétique, avec Fondaction et sa politique de développement durable, etc…Or ce sont les mêmes acteurs qui, sur la scène internationale, se manifestent présentement à partir d’une entrée première qui est l’économie et non l’écologie. Mais qui veut faire cheminer l’économie vers une réponse à l’urgence écologique.

Autre virage en route : le développement d’outils financiers propres de la solidarité internationale

Le GESQ n’est pas étranger à la naissance d’un fonds de dotation, le Fonds Solidarité Sud. Le Fonds Solidarité Sud est un dispositif financier de moyen terme plus que jamais pertinent dans le contexte actuel de forte crise du financement public de la coopération internationale de proximité. Ce type d’outil financier est indispensable pour assurer plus d’indépendance d’action aux OCI et un travail avec des partenaires du Sud qui soit plus solidement inscrit dans la durée.

La mouvance du GESQ a peut-être perçu plus rapidement que d’autres la fragilité économique de la coopération internationale de proximité et par effet rebond celle des OCI à savoir, en premier lieu, la concurrence plus grande avec des OCI confessionnelles comme Vision mondiale observable tant au Québec que dans plusieurs pays du Sud. En second lieu, c’est la fragilité politique de cette coopération de proximité des OCI du Québec, c’est-à-dire sa dépendance du financement public, qui ressort d’autant plus qu’avec le gouvernement Harper, le rétrécissement de la marge de la manoeuvre par rapport à ce bailleur de fonds majeur de l’aide internationale qu’est l’ACDI s’est accentué. En provenance de différentes régions du Québec, le Fonds Solidarité Sud naît fin 2007. Ce réseau de personnes en provenance du monde syndical, du monde coopératif, du monde agricole, du monde de l’enseignement, du monde culturel et du monde de la coopération internationale met de l’avant une nouvelle forme de financement de la solidarité internationale : un fonds de dotation.

En fait, précise le site de l’organisation « les fonds de dotation ont des finalités sociales qui varient: philanthropie, aide humanitaire, coopération technique ou solidarité internationale ». Or pour le Fonds Solidarité Sud, c’est la solidarité internationale dans une perspective de justice économique, sociale et écologique, tant à l’échelle locale qu’à celui de la planète qui prévaut. C’est ce qui anime cette organisation et en priorité la solidarité internationale entre communautés et mouvements sociaux du Nord et du Sud, ce qui le met en phase avec le GESQ dont quelques-uns de ses animateurs sont aussi des artisans du Fonds.

Un temps associé à une organisation de coopération internationale, Développement et Paix, le Fonds Solidarité Sud est devenu autonome et s’est incorporé en 2010. Il est également un organisme «de bienfaisance» au sens de la loi fédérale depuis 2012. Son objectif premier : le renforcement économique et social de communautés au Sud dans une perspective de solidarité Nord-Sud qui se démarque de la coopération technique (l’envoi de coopérants) et du secours d’urgence (l’aide humanitaire), ce qui le rapproche en même temps des OCI du mouvement coopératif comme SOCODEVI comme du syndicalisme agricole comme UPA-DI.

Grâce aux contributions financières qu’il reçoit, les intérêts générés par ce fonds permettent d’appuyer des projets de partenaires dans les pays du Sud. Le Fonds Solidarité Sud (FSS) est un fonds dédié qui a un programme de dons planifiées (dons par police d’assurance-vie; legs testamentaire; dons d’actions ou d’obligations, dons mensuels, etc.). Il dispose présentement d’un capital différé d’une valeur d’un million $ et des liquidités suffisantes pour avoir démarré un travail de soutien en 2013 et 2014 avec une jeune coopérative forestière au Honduras (en collaboration avec SOCODEVI) et avec une organisation paysanne sénégalaise (en collaboration avec UPA-DI).

Quant au GESQ, il est sur son air d’aller du virage écologique en s’attaquant plus à fond au chantier de l’agriculture et de l’alimentation. Il tiendra la 7e édition de son Université d’été les 23 et 24 mai prochain avec deux invités spéciaux : à l’ouverture, une invitée de la haute direction de la FAO, conseillère en sécurité alimentaire et, à la clôture, un invité de la direction de l’Association des Rencontres du Mont-Blanc, Gérald Larose, également président de la Caisse d’économie solidaire Desjardins. On en reparle bientôt.

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