Notre système de santé est mal en point. Pour trouver remède aux maux qui l’accablent, les solutions ne sont pas simples, les propositions du dernier budget ne semblant d’ailleurs pas faire l’unanimité dans la population vu leurs caractères régressifs. Dans plusieurs localités du Québec, on tente de faire autrement, en pansant les plaies par l’usage du modèle coopératif.
Depuis une quinzaine d’année, une quarantaine de coopératives de santé ont été mises sur pied au Québec. La première coopérative de santé a vu le jour en 1995 dans la petite localité de Saint-Étienne-des-Grès, à 18 kilomètres au sud de Shawinigan. C’est le directeur de la caisse populaire de la place, Jacques Duranleau, qui imagina le modèle. L’unique médecin du village venait alors de décéder et les habitants du village voulant trouver des soins devaient se tourner vers Trois-Rivières. L’employeur de M. Duranleau le libéra pour un an de sorte à ce qu’il travaille sur le projet. « Nous n’avons pas attendu après Québec ou Ottawa pour se donner les moyens d’assurer l’offre de soins de santé sur notre territoire » explique M. Duranleau. Aujourd’hui, la coopérative de Saint-Étienne-des-Grès s’autofinance complètement par la location d’espaces à des médecins, à une pharmacie, à un dentiste, à un centre de physiothérapie, à un bureau de psychologue, à un massothérapeute et un à ostéopathe.
L’idée de base de la coopérative de santé est de fournir aux médecins les conditions idéales de pratique de sorte à pouvoir garder dans une localité les services de santé. Dans la majorité des cas, les membres de la coopérative doivent défrayer une partie des coûts d’opération. Dans le cas de la coopérative de St-Marc à Shawinigan, par exemple, les 4000 membres de la coopérative contribuent à raison de 60 dollars par année. Les membres de la coopérative sont propriétaires de la bâtisse et louent leur espace à des médecins qui sont de leur côté rétribués par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ).
Montréal serait sur le point de voir l’implantation de sa première coopérative dans le quartier Villeray ou Rosemont. C’est que la coopérative de santé, en plus de constituer un moyen de garder les services en régions, répond également à d’autres besoins. Même si Montréal est la région où se trouve le plus grand nombre de médecin par habitant au Québec, il demeure fort difficile d’y trouver un médecin de famille. « Avec la coopérative, on souhaite attirer des omnipraticiens vers la médecine familials » explique Denis Missud, coordonateur du projet de coopérative à Montréal.
Ces initiatives posent d’importantes questions au principe d’universalité du système de santé. Comme le remarquait Guillaume Jacob de Montréal Campus (voir p.9), « en imposant des contributions, les coopératives ne compromettent-t-elles pas l’accessibilité du système de santé? » Marie-Joëlle Brassard, directrice de la recherche au Conseil québécois de la coopération et de la mutualité ne croit pas qu’il y ait péril en la demeure. « On a souvent une vision binaire, public contre privé. La coopérative constitue une troisième voie » selon cette dernière. « Je pense que le système de santé a avantage à intégrer les coopératives de santé comme outils de prévention. Dans ce cas-ci, c’est la population qui définit ses besoins. C’est une nouvelle façon de faire » souligne-t-elle. Les coopératives de santé ouvrent la porte à une prise en charge de la santé par les citoyens.
Comme on le remarquait l’automne dernier sur OikosBlogue, il existerait des coopératives de santé dans plus de 43 pays, le Japon étant un des pays les plus développé dans leur usage. Lors du Colloque sur la prévention et la promotion de la santé qui se tiendra le 4 juin prochain à Sherbrooke, le modèle japonais sera d’ailleurs présenté. La Fédération des coopératives de services à domicile et de santé du Québec invite également la population à un deuxième colloque provincial sur les coopératives de santé qui se tiendra le 28 avril prochain à Québec.
Bonjour,
Dommage que cet article ne mentionne pas la nouvelle position officielle de la Fédération des coops de santé: « Les coops doivent respcter la Loi canadienne de la santé et ne pas faire payer de cotisation annuelle pour les services médicaux ». La cotisation ne doit être exigée que pour les services autres que médicaux (c’est la philosophie de la Coop de Villeray, entre autres). Il ne faudrait pas attendre un recours collectif contre les coops pour comprendre cela. Charest veut imposer un ticket modérateur mais ne veut pas qu’on appelle cela un ticket modérateur. Marie-Joëlle Brassard tient un langage un peu tordu qui ressemble à celui de Charest quand elle dit que les coops qui chargent une cotisation pour les frais médicaux ne posent pas problème.
Jacques Fournier
organisateur communautaire retraité
Les organisateurs communautaires sont parfois surpris de la volonté même des membres des coopératives de vouloir s’organiser. Prenons l’exemple de la mise en place de groupes de prévention sur le modèle des coopératives de santé au Japon. Les groupes Hans sont en phase de démarrage à la coop santé Robert-Cliche en Beauce ainsi qu’à Contrecoeur en Montérégie. La mise en place de groupes de prévention permet des partenariats avec le milieu et sont complémentaires avec les services offerts par le système public. Les membres auront accès à cette nouvelle façon de se prendre en main et de se responsabiliser face à leur santé. Ils sentiront que la cotisation annuelle qu’ils paient vaut le coût. Avant d’avoir une coopérative dans le cas de Contrecoeur, les membres devaient payer de l’essence pour se rendre soit à Longueuil ou Sorel. À Montréal, la situation est l’inverse: il y a des cliniques à presque chaque coin de rue, mais le jour où vous tombez malade, vous pouvez bien aller dans un sans rendez-vous auprès d’un médecin que vous rencontrez pour la première fois et qui vous fera des tests bidons que vous devrez payer… pour rentabiliser ses coûts personnels… Laissez-moi vous dire que j’ai été assez déçue de cette expérience et que c’est sans compromis que je suis devenue membre de la coop santé Villeray pour seulement 20$ de part sociale. La cotisation est à suivre… mais elle en vaudra aussi le coût!!!
Bonjour,
Action santé Outaouais est très préoccupé par le développement du modèle de coop de santé au Québec. Dans le but de favoriser le débat sur la question, nous publions un observatoire sur les coopératives de santé au Québec, observatoire qui prend la forme d’un blogue. Nous vous invitons à le visiter.
Bonne visite
François Marchand
Action santé Outaouais
Je remercie « Hélène » pour son commentaire précédent mais j’aurais aimé connaître le nom de famille de mon interlocutrice.
Je sais qu’il y a de nombreux blogues qui publient des commentaires non signés (signés de divers pseudonymes) mais ce n’est pas dans ma culture. J’aime bien discuter avec les gens à visière levée.
Oikosblogue.coop pourrait-il se donner une politique du genre « des textes vraiment signés » ?
Jacques Fournier
organisateur communautaire retraité
Nous avons dans notre région une coop de santé qui fonctionne à partir de parts sociales des membres payable une fois seulement mais financé en même temps par les dix municipalités environnantes qui y ont adhéré et qui paient, année après année, pour au moins cinq ans. Je pense que cette façon de financer est très peu équitable et possiblement illégale. Quelqu’un pourrait-il m’informer quant à la légalité de cette façon de faire? Pour ma municipalité, il s’agit de versements correspondant à plus de 18,000.00 par année pour environ 1650 personnes, et seulement 16% de notre population y est membre. On oblige donc le reste de la population à payer de par ses taxes municipales
Je réponds un peu tardivement, désolée. Je ne suis peut-être pas habiletée pour répondre à Mme De Tonnancourt, mais je peux certainement amener une piste de réponse.
Effectivement, les municipalités ne peuvent selon la loi financer des coopératives comme elles sont considérées comme une entreprise. Dans le domaine de la santé, on étire l’élastique un petit peu.
Il est important de dire qu’une municipalité ne peut devenir membre d’une coopérative et c’est à son bon vouloir de supporter la coopérative financièrement ou de façon logistique. Aussi, quand vient le temps de changer d’administration comme lors des dernières élections, il faut voir qu’est-ce qui lie légalement la coop aux municipalités.
Si le ministère de la Justice se penchait sur toutes les pratiques des municipalités en termes de financement, il y aurait un bon ménage à faire.
Finalement, vaut-il peut-être mieux d’instaurer la cotisation annuelle pour ceux qui veulent adhérer à la coopérative et développer des avantages membres en conséquence tout en respectant la loi sur l’universalité des soins de santé.
Les « coopératives de santé » ne sont apparues dans le décor québécois que pour une seule raison : la pénurie de médecins qui sévit actuellement. Si chaque québécois avait accès à un médecin de famille, à qui viendrait l’idée de s’engager à payer une cotisation annuelle pour obtenir des services équivalents dans une coopérative de santé ?
On le sait, le quart des Québécois n’ont pas de médecins de famille. En acceptant de verser une contribution annuelle à une « coopérative » de santé vous garderez ou attirerez chez vous des médecins qui soignaient ou seraient allés soigner d’autres patients ailleurs. Cette solution n’élimine en rien la pénurie de médecins, LE vrai problème. Elle ne crée aucun médecin supplémentaire. Quand tous nos médecins seront en « coopérative » de santé, il restera toujours des patients impatients de s’en trouver un. Si ces laissés pour compte veulent attirer chez eux des médecins, la nouvelle « coopérative » de santé qu’ils formeront devra leur offrir davantage que ce qu’offrent les coops existantes : ce sera la surenchère. Vous appelez cela de la « coopération » ?
Attirer chez soi le médecin des autres en lui payant un meilleur environnement de travail, ça n’a absolument rien à voir avec le mouvement coopératif ! C’est de la fausse représentation. Mais le mot « coopératif » se vend bien, on a l’impression de se prendre en main : excellent marketing. Si j’étais un brin méchant, ce que je ne suis pas, j’irais même jusqu’à dire que les médecins qui y adhèrent sont des profiteurs de pénurie : « Je soignerai les plus offrants ».
Comment peut-on expliquer qu’une société développée comme la nôtre ne réussisse pas à engendrer un nombre suffisant de médecins pour soigner sa population ? Même Cuba, la pauvre, réussit. Elle se permet même d’en exporter dans d’autres régions d’Amérique latine.
La pénurie de médecins que nous connaissons actuellement n’est ni fortuite, ni temporaire. Bien que la mise à la retraite de nombreux médecins sous le gouvernement Bouchard en soit le début, elle ne peut plus, 8 ans plus tard, justifier la situation dans laquelle on stagne encore aujourd’hui. Le nombre de candidats en médecine dans nos universités est toujours aussi contingenté. Et on savait pertinemment que l’arrivée massive des femmes dans la profession, ce qui en soi est excellent, allait amplifier le problème. Et comment expliquez-vous que le Québec soit la province canadienne qui accepte le moins de médecins étrangers ?
Cette pénurie a été concoctée, planifiée dans un but précis : moins il y aura de médecins disponibles, plus la pression sera forte et plus les Québécois qui en auront les moyens seront attirés par la privatisation de notre système de santé. Tant pis pour les autres. Les « coopératives » de santé ? Un premier pas dans la « bonne » direction !
Certains me répondront que le gouvernement n’a plus les moyens de financer notre système de santé public. Balivernes ! Je suis poli de nature, vous l’avez remarqué… Si vous décidez de couper dans vos recettes, vous ne pouvez plus mener le même train de vie, c’est clair. Quand le gouvernement prétend qu’il n’a plus les moyens de financer notre système de santé public, il oublie de mentionner qu’il a au préalable coupé lui-même dans nos recettes.
Souvenez-vous que le gouvernement actuel s’est fait élire en promettant de baisser les impôts. Qui plus est, si vous visitez le site Internet d’Investissement Québec vous pourrez lire ceci : « Au Québec, les taux d’imposition sont parmi les plus bas au Canada et même inférieurs à ceux de la plupart des états américains. […] Au Québec, le taux d’impôt des sociétés s’établit à 29,9 %. Ce taux sera graduellement réduit à 26,9 % en 2012. » Tant pis pour les 25 % de Québécois qui n’ont pas de médecin de famille. Tant pis pour tous ceux qui sèchent dans nos urgences…
Pas facile, croyez-moi, de rester poli…
J’aimerais savoir s’il existe une ou des coopératives santé situées dans la ville de Québec ou dans sa banlieue.
Merci