Ce n’est pas un altermondialiste qui le proclame : l’annonce de la fin de la mondialisation nous vient plutôt d’un économiste réputé, jusqu’à tout récemment économiste en chef de la CIBC, Jeff Rubin. En plus, c’est en raison même de ses prises de position, non cautionnées par son employeur, qu’il quitte la CIBC après 20 ans à son service.
L’économiste Jeff Rubin fait partie du courant d’experts qui cherchent à démontrer que nous avons atteint, ou sommes en voie d’atteindre, un pic dans la production mondiale du pétrole et que nous nous acheminons à partir de maintenant vers un changement en profondeur d’un modèle économique qui jusqu’à maintenant était basé sur l’énergie à bon marché. Il faut préciser que Rubin a été parmi les premiers à prévoir un baril de pétrole à plus de 100 $, avec ses conséquences sur l’activité économique mondiale. Selon lui, la crise économique actuelle est d’ailleurs davantage causée par l’enjeu énergétique que par la crise des subprimes.
Rubin va plus loin aujourd’hui en publiant un livre choc sur cette question : Why Your World Is About to Get a Whole Lot Smaller: Oil and the End of Globalization, dans lequel il présente le scénario d’un changement radical des échanges économiques mondiaux dû à une crise énergétique globale. Dans la mesure où toute l’activité économique actuelle repose sur une énergie abondante et peu coûteuse, la fin de cette ère du pétrole abordable signifie tout simplement la fin de la mondialisation, la fin de la vie économique telle que nous la connaissons depuis une quarantaine d’années. Pour lui, l’économie mondiale devrait bientôt revenir au point où elle était dans les années 1960.
Pour Jeff Rubin, l’économie s’apprête à vivre un choc historique, qui nous ramènerait à privilégier les échanges locaux puisque le transport sur une longue distance des biens deviendrait inabordable. Non seulement verrait-on le retour à une agriculture plus locale, mais on assisterait au retour des industries manufacturières vers des marchés de proximité.
Dans le court terme, Jeff Rubin prévoit un baril de pétrole qui remonterait rapidement à 100 $, avant la fin de 2010, pour monter graduellement à 225 $ d’ici 2012. D’autant plus que la crise financière actuelle a conduit à une baisse des investissements pétroliers, préparant ainsi le terrain pour des hausses de prix brusques. Le prix du baril s’est déjà relevé à 70 $ alors que la reprise n’est encore que dans l’imagination des analystes et spéculateurs. N’en doutons pas, la dynamique devrait s’accélérer rapidement lorsque les spéculateurs chercheront massivement à en tirer profit.
[...] De son côté, l’importation de pétrole coûte 14 milliards de dollars par année, précise le rapport du RéseauIQ, rappelant qu’avec la pression mondiale sur la demande de pétrole et l’instabilité politique de certaines régions productrices, ces coûts pourraient encore augmenter, comme nous l’avons mentionné nous-mêmes dans notre article du 10 juin La dernière heure de la mondialisation aurait-elle sonné ? [...]