Au cours des dernières semaines, j’ai évoqué le rôle des entreprises du secteur de l’énergie fossile non seulement comme principal obstacle à la nécessaire lutte contre les changements climatiques, mais également en tant que principaux partenaires financiers des forces socialement réactionnaires aux États-Unis. Le Gouverneur républicain du Wisconsin, grand État industriel du nord des États-Unis, a parfaitement démontré, ces dernières semaines, que les craintes provenant de la gauche étatsunienne ne sont pas exagérées.

Le nouveau gouverneur Scott Walker, élu aux élections de mi-mandat sous la bannière républicaine – mais dans la mouvance du Tea Party -, a en effet décidé de prendre des mesures drastiques pour effacer le déficit de l’État de 137 millions $, qui devrait s’élever à plus de 3 milliards $ d’ici 2013. Il faut dire que les effets de la crise sur les finances de l’État, auxquels s’ajoute cette année la fin des mesures de relance de l’administration fédérale, ont été aggravés par les baisses de diverses taxes que le gouverneur s’est dépêché de réaliser après sa prise de fonction. Maintenant il veut en faire payer le prix par les fonctionnaires et les plus démunis. La crise a éclaté lorsqu’il a décrété que l’État ne respecterait plus les droits de ses fonctionnaires à pouvoir négocier une convention collective.

Pour bien comprendre l’esprit qui anime ce gouverneur teapartier, il faut aller lire le billet de WonkRoom paru la semaine dernière qui présente les 10 politiques les plus désastreuses proposées par la droite républicaine du Wisconsin depuis l’arrivée du gouverneur Walker : élimination du MedicAid, privatisation des sociétés d’utilité publique, diminution des dépenses liées à l’environnement, etc.

Devant ces attaques inacceptables, dans tous les domaines, les leaders sociaux et environnementaux se sont joints dans une vaste coalition pour bloquer ces politiques réactionnaires. « Labor and environmental leaders from the BlueGreen Alliance today came together to decry the continuing efforts to dismantle unions through a barrage of legislative proposals designed to weaken collective bargaining and on-the-job protections. Environmental leaders in particular recognized the importance of negotiating safer, healthier workplaces and connected this fight with attacks on the Environmental Protection Agency’s authority to regulate pollution under the Clean Air Act. »

La Chambre des représentants de l’État est depuis deux semaines bloquée par les manifestants et par la décision des représentants démocrates de quitter l’État, pour éviter de devoir se présenter en chambre et créer quorum. Mais cette lutte va bien au-delà de l’État. Scott Walker met en place au Wisconsin le programme politique de l’extrême-droite étatsunienne. Eric Lipton, du New York Times, a bien montré que l’agenda du gouverneur teapartier Walker est celui formulé l’an passé par le multimilliardaire Koch. Dans une lettre qui circule dans les milieux ultraconservateurs, Koch affirme : « If not us, who ? If not now, when ? It is up to us to combat what is now the greatest assault on American freedom and prosperity in our lifetimes. » [Cliquez ici pour voir le document infographique sur les liens Koch/Walker]

Pour Paul Krugman, Prix Nobel d’économie, les similarités entre les révoltes des pays du Moyen-Orient et celle qui est apparu dans l’État du Wisconsin ne sont pas négligeables. Ce qui se passe dans le Wisconsin, affirme-t-il, n’est pas une histoire de rigueur fiscale mais de pouvoir. Walker et ceux qui le soutiennent essaient de faire du Wisconsin, et à terme de l’Amérique, « moins une démocratie qui fonctionne qu’une oligarchie du tiers monde ».