L’automne devrait être chaud. Bien sûr, les étudiants auront tout à fait raison de foutre la pagaille dans le réseau postsecondaire puisque les augmentations de droits de scolarité dont ils seront les victimes n’ont aucun sens. Mais, pour la visibilté médiatique, ils devraient être en compétition avec le mouvement citoyen contre les gaz de schiste qui ont, cet été, rappelé qu’ils intensifieront leurs moyens de pression au cours de l’automne afin de gagner la bataille de l’opinion publique.
En plus des manifestations qui devraient être programmées, on parle de mettre sur pied une table ronde (qui devrait réunir environ 400 spécialistes) sur les sources d’énergie nouvelles afin de sortir d’une dynamique de « front du refus » en proposant des solutions de rechange aux gaz de schiste. Alors que le gouvernement apparaît à tous comme ayant les mains liés aux intérêts de l’industrie des gaz de schiste, les opposants vont proposer des solutions alternatives qui ne peuvent que s’inscrire dans l’intérieur supérieur de tous les Québécois.
« Le gouvernement a réussi à faire croire à une certaine portion de la population que ce serait une catastrophe si on ne sortait pas du sol ces gaz de schiste, alors qu’il y a des solutions alternatives que le gouvernement devrait proposer aux citoyens, mais il ne le fait pas parce qu’il est trop engagé dans le mouvement d’appui à cette industrie. »
Comme le souligne Lucie Sauvé, qui est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en éducation relative à l’environnement, à l’Université du Québec à Montréal, « S’il y a un pays dans le monde qui a le potentiel, les ressources et le talent pour devenir un leader des sources d’énergie alternatives, c’est le Québec ».
D’autant plus que, même avec un niveau d’exploitation de très faible amplitude, les puits en exploitation au Québec causent déjà des problèmes graves. Un puits de gaz de schiste qui risquait de contaminer la nappe phréatique, que la ministre Nathalie Normandeau avait ordonné de fermer fuit toujours, plus de six mois après la détection des fuites et de nombreuses tentatives pour les colmater. Après avoir été dénoncé par les opposants au gaz de schiste, le gouvernement revient maintenant sur sa décision : plutôt que de forcer la fermeture du puits situé à La Présentation, près de Saint-Hyacinthe, il vient d’autoriser l’entreprise albertaine propriétaire, Canbriam, à le réparer pour cesser ces fuites. Canbriam devra injecter du ciment entre le tube d’acier et le roc foré pour tenter ainsi de boucher les fuites.
Les opposants aux gaz de schiste estiment que la fermeture du puits avec un couvercle aurait été la pire des solutions puisque le méthane aurait cherché à sortir par d’autres issues. Mais le colmatage autorisé ne trouve pas non plus grâce. C’est l’avis d’un géologue retraité, Marc Durand, qui soutient que la cimentation ne constitue rien d’autre que des travaux de réparation de défauts de construction « Toutes ces opérations constituent des pis-aller et mettent en lumière les aléas, beaucoup plus fréquents que l’industrie veut l’admettre, des lacunes des techniques face à la complexité de la géologie locale », affirme M. Durand.
Paul Lamoureux estime que les problèmes du puits de La Présentation illustrent bien le fiasco des gaz de schiste au Québec. « C’est ce qu’on craint tout le temps: quand il y a des fuites comme ça, en raison de la technique qui n’est pas efficace, il n’y a plus moyen de fermer le puits. Qu’est-ce qu’on peut dire de plus ? C’est un fiasco », a dit M. Lamoureux, porte-parole du Comité de mobilisation gaz de schiste Mont-Saint-Hilaire-Beloeil.
Pour Scott McKay, porte-parole du PQ en matière de mines, c’est la ministre Normandeau qui est irresponsable. « Ce serait un peu facile de dire que la ministre a menti aux Québécois [en ordonnant la fermeture du puits], a-t-il affirmé en entrevue téléphonique. Je pense qu’elle n’a même pas menti, parce qu’elle ne savait même pas de quoi elle parlait [...]. Elle a dit n’importe quoi. C’est scandaleux que la ministre qui est responsable de tout ce fiasco ne sache même pas que fermer un puits, ça veut dire en prendre la responsabilité. »
Dans ce dossier, le Parti québécois devrait déposer, l’automne prochain, un projet de loi pour interdire la fracturation hydraulique, un procédé controversé utilisé pour extraire les gaz de schiste. Scott McKay a fait savoir qu’il est en train de travailler à l’élaboration du projet de loi. Incapable d’obtenir le moratoire qu’elle demande sur les gaz de schiste, l’opposition péquiste change donc de stratégie, même si les chances de réussite sont minces. Le caucus des députés du parti n’a pas encore été consulté sur le dépôt du projet de loi, a précisé M. McKay, mais il a le sentiment que ses collègues vont cautionner la démarche.
Selon Le Devoir, en mars dernier au Québec, il y avait 31 puits, dont 18 avaient déjà été fracturés. L’industrie du gaz de schiste avait dépensé 200 millions au Québec pour divers travaux.
[...] Alors qu’il n’y a pas un seul puits en opération, les dégâts sont déjà nombreux (voir mon billet du 6 septembre ou encore le texte collectif de Sauvé et al.). Et malgré l’arrêt des forages, les impacts [...]