Les propos des analystes et journalistes fluctuent autant que les indices boursiers. Au gré des nouvelles quotidiennes, ils se laissent emportés par le flot des rumeurs et humeurs des spéculateurs. Il y a quelques jours, la Banque du Canada annonçait dans un communiqué qu’étant donné la conjoncture, elle laissait le taux cible du financement à un jour à 1%. « Les effets combinés de la réduction en cours du levier d’endettement des banques et des ménages, de l’austérité budgétaire accrue et de la baisse de la confiance des entreprises et des consommateurs devraient restreindre la croissance dans les économies avancées, signale le communiqué. La Banque s’attend maintenant à ce que la zone euro, où cette dynamique se manifeste avec le plus d’acuité, connaisse une brève récession. » Elle reste néanmoins optimiste pour l’économie canadienne. Nous ne partageons pas cet optimisme.
Même si la croissance du PIB du 3e trimestre s’avère positif (ce que confirmeraient les chiffres des mois de juillet et d’août), écartant ainsi une récession ‘technique’ de deux trimestres négatifs d’affilés, il n’y a pas lieu d’être optimiste. Ce qui est en jeu, dans les années qui viennent, c’est la possibilité d’une longue période de stagnation pendant laquelle deux secteurs économiques (pétrole et finance) s’accapareraient les fruits de la croissance alors que le reste de l’économie stagnerait. C’est exactement ce que nous présente le PIB du mois d’août.
Plusieurs indicateurs récents de l’économie canadienne montrent déjà un retournement de la conjoncture. Le nombre de personnes ayant touché des prestations ordinaires d’assurance-emploi a augmenté de près de 7% en août pour s’établir à 568 600. Le nombre de prestataires a augmenté dans toutes les provinces, les plus fortes hausses en pourcentage ayant été observées au Manitoba, en Ontario, au Québec, en Nouvelle-Écosse et en Saskatchewan.
Mais le nombre de demandes initiales et renouvelées de prestations d’assurance-emploi a augmenté pour un deuxième mois d’affilée. En fait, comme on peut le constater dans le graphique suivant, c’est depuis le mois de février qu’un tournant a été donné qui ne peut que dégénérer vers une explosion de nouvelles demandes étant donné la détérioration des économies de nos partenaires et la politique insensée de redressement des finances publiques du gouvernement conservateur, maintenant majoritaire.
Par ailleurs, l’indicateur avancé composite est demeuré presque inchangé pour un quatrième mois d’affilé. Comme on le sait, cet indicateur est avancé puisqu’il donne des indications sur l’activité économique 4 ou 6 mois en avance. Encore une fois, dans la mesure où tout indique, par ailleurs, que la situation économique est en train de se détériorer ailleurs dans le monde dans les mois à venir, la probabilité d’une deuxième récession en trois ans est de plus en plus probable.
Et c’est d’autant plus sérieux qu’en même temps nous faisons face à une croissance marquée de l’inflation. Les prix à la consommation ont augmenté de 3,2 % au cours de la période de 12 mois se terminant en septembre, menés par une hausse des prix de l’essence et des aliments. Au Québec, les prix ont progressé de 3,4 %, soit une hausse identique à celle enregistrée en août. Les prix de l’essence se sont accrus de 24,9 %. Les consommateurs québécois qui n’ont pas fait la conversion de leur fournaise au mazout, ils ont déboursé 33,6 % de plus (un argument de plus pour passer à l’électricité). Pour l’ensemble du Canada, les prix de l’énergie ont progressé de 12,5 %, et ceux des aliments de 4,3 %, au cours de la période de 12 mois se terminant en septembre. Sans les aliments et l’énergie, l’Indice des prix à la consommation (IPC) a néanmoins augmenté de 1,9 % au cours de la même période de 12 mois. D’une année à l’autre, des hausses de prix plus élevées ont été observées en septembre pour l’achat de véhicules automobiles, les vêtements ainsi que les primes d’assurance de véhicules automobiles.
Dans ce contexte, non seulement les Canadiens vont craindre de plus en plus de voir se détériorer leur situation économique dans les mois à venir, mais vont commencer, dès maintenant, à restreindre leur consommation (en termes réels) dans la mesure où leur pouvoir d’achat se réduit. Du moins ce sera le cas pour ceux qui sont dépendant de l’automobile et du pétrole, ce qui constitue encore aujourd’hui la vaste majorité des consommateurs.
Dans un prochain texte j’apporterai des éléments de conjoncture pour l’Europe et les États-Unis pour compléter ce tableau.
[...] y a quelques semaines j’affirmais dans un billet que l’économie canadienne montrait un retournement de conjoncture, sur la base de quelques [...]