Dans des articles récents, j’ai abordé les enjeux des taxes carbones à l’importation. Ce n’est pas le thème du présent texte. La taxe carbone dont il est question ici est une mesure de lutte contre les changements climatiques aux incidences domestiques.
On a vu dans un article précédent que les deux mesures couramment proposées pour diminuer les GES sont, soit un marché de permis d’émissions (cap-and-trade) qui permet d’internaliser les externalités en distribuant des droits de propriété jusqu’ici absents du marché, soit une taxe sur les volumes de carbone émis (une accise) qui permet d’intégrer au prix les dommages engendrés. Trop souvent on a tendance à opposer ces deux instruments, comme si l’utilisation de l’un empêchait automatiquement celle de l’autre. La mise en place d’une taxe carbone en France (parfois appelée la taxe climat énergie) montre pourtant qu’une utilisation combinée de plusieurs instruments représente souvent la solution optimale d’une politique publique contestée mais néanmoins nécessaire.
La France, qui est partie prenante du marché du carbone européen, a donc décidé de créer une nouvelle taxe sur le carbone. Le ministre responsable du Budget Eric Woerth, répondant aux critiques de Ségolène Royal, des chefs d’entreprises et des agriculteurs, présente la taxe comme la première pierre d’une nouvelle politique fiscale et rappelle que cette fiscalité est avant tout incitative : elle doit encourager les Français à consommer moins de gaz ou de pétrole. Pour lui, ce n’est pas une nouvelle taxe; c’est en quelque sorte une réforme fiscale qui serait « neutre » puisque la nouvelle contribution serait reversée intégralement aux contribuables
Selon le président Sarkozy, la taxe carbone sera créée en 2010, mise en place sur une base progressive et compensée intégralement par la réduction d’autres prélèvements fiscaux. Elle permettra d’inciter les consommateurs et les entreprises à réaliser des économies d’énergie tout en contribuant à lutter contre le réchauffement climatique.
Le premier ministre, François Fillon, aurait déclaré que la taxe serait fixée initialement à 14 euros par tonne de CO2 (soit le prix actuel de la tonne de CO2 sur le marché européen) alors que la commission Rocard, qui avait soumis une série de recommandations sur la contribution climat énergie, avait proposé 32 euros comme prix initial, qui devrait cependant atteindre 100 euros la tonne vers 2030 pour être efficace. La taxe ne toucherait pas l’électricité.
L’opposition politique et les écologistes s’opposent à la taxe carbone de Sarkozy. Le bureau national du PS avait dit oui à « une contribution climat énergie » mais pas telle que voulue par le gouvernement. Ségolène Royal fustige une taxe « inefficace écologiquement et qui prend du pouvoir d’achat aux Français ». L’ex-Premier ministre Laurent Fabius parle d’un « impôt Sarkozy ». Les écologistes ont estimé qu’à 14 euros par tonne de CO2, la contribution perd toute efficacité, plaidant pour un taux plus élevé. Tous plaident pour une fiscalité qui couvre toutes les sources énergétiques à un niveau qui permette le changement des comportements.
Selon un sondage récent, 2 Français sur 3 (66 %) sont opposés à la taxe carbone, quel que soit leur bord politique. Les foyers ouvriers s’y opposent massivement (à 75 %), contrairement aux cadres, plus partagés (57 %). Mais l’efficacité de la taxe est remise en cause par 73 % des Français, 36 % pensant qu’elle ne serait « pas du tout » efficace et 37 % « plutôt pas » efficace. Pour 63% des sondés, les particuliers font assez d’efforts pour consommer moins d’énergie.
[...] Le président Sarkosy n’ignore certainement pas l’hostilité des Français à l’instauration d’une nouvelle taxe, ce qui explique qu’il s’éloigne passablement des 32 euros qu’avait prôné la commission d’experts dirigée par Michel Rocard. Tous les écologistes demandaient un prix « significatif » et avaient mis en garde le gouvernement contre des « mesures placebo » (voir mon article précédent). [...]
Une contribution au débat: Carbone mon amour
http://www.liberterre.fr/gaiasophia/gaia-climats/generaux/carbonemonamour.html
[...] une opposition assez massive des Français face à une nouvelle taxe qui aurait de tels effets (les deux-tiers des Français y sont opposés), le gouvernement a finalement décidé d’aller de l’avant avec la taxe sur le carbone mais en [...]