J’ai déjà à plusieurs reprises mentionné cette lutte particulièrement symptomatique des forces en présence aux Etats-Unis autour de l’enjeu des changements climatiques. Le groupe qui est derrière la proposition 23, qui veut faire passer un amendement à la loi sur le climat de l’État, la plus progressiste des Etats-Unis, est le California Jobs Initiative, dont 80 % des fonds proviennent de l’extérieur de la Californie, notamment de compagnies pétrolières texanes ainsi que des frères Koch, deux milliardaires d’extrême-droite qui sont aussi les bailleurs de fonds du Tea Party. Arguant que la loi sur le climat de Californie nuit à l’économie, en obligeant les consommateurs à payer plus cher leur énergie, l’amendement permettrait de la suspendre jusqu’à ce que le taux de chômage de l’État retombe à un niveau de 5,5 % pendant quatre trimestres successifs. Le taux de chômage actuel est de 12,4 %.
Dans un autre billet, au mois de septembre, je renvoyais les lecteurs à une contribution du site TheEnergyCollective qui donnait un éclairage évocateur des appuis financiers des campagnes du oui et du non de la proposition 23 : du côté du oui, l’industrie pétrolière et gazière; du côté du non, les entreprises de la Silicon Valley, qu’elles soient ou non dans les technologies propres, les environnementalistes et les démocrates.
Plus récemment, la League of Conservation Voters (LCV), un groupe de pression environnementaliste, a fait de la proposition 23 l’un de ses Dirty Dozen. À chaque élection (celle du 2 novembre sera la huitième campagne du genre), cette organisation identifie les candidats « who consistently vote against clean energy and conservation and are running in races in which LCV has a serious chance to affect the outcome. » Pour les élections de mi-mandat, ces dirty dozen sont 10 candidats républicains, un démocrate et la proposition 23. La LCV a contribué à hauteur de 1,2 million $ à la campagne du non à cette proposition.
La semaine passée, alors qu’un sondage soulignait que le camp du non commençait enfin à prendre les devants par une marge appréciable (48 % contre 37 %), ce sont des poids lourds qui sont venus ajouter leur voix aux opposants. Ainsi, le président Obama, l’ancien vice-président Al Gore et l’actuel gouverneur de la Californie, Arnold Schwarzenegger, ont signifié leur appui dans cette lutte contre les « corporate polluters ». Bill Gates s’est aussi joint à la campagne du non en leur accordant 700 000 $. Dans la même semaine, James Cameron (réalisateur du film Avatar) et Gordon Moore (cofondateur de la firme Intel) ont chacun ajouté 1 million $ pour les derniers jours de la campagne. Finalement, tout ce que la Californie compte comme institutions de la finance responsable et de capital de risque spécialisé dans les technologies propres, conduites par le Investor Network on Climate Risk, ont apporté leur appui au camp du non. Il faut dire que la Californie représente l’épicentre de la révolution technologique des énergies propres aux Etats-Unis. Et qu’une victoire du oui représenterait un sérieux défi pour ceux qui garde un espoir de changement dans ce domaine.
En définitive, même si les médias donnent une ampleur démesurée au mouvement réactionnaire et négationniste du Tea Party, même si Obama perd sa majorité et son pouvoir d’initiative en raison de la démobilisation d’une partie de son électorat, il restera dans ce pays certains pôles importants de l’indispensable lutte contre le réchauffement.
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