Dans un billet récent, qui portait sur les profits des pétrolières, je mentionnais qu’en 2011 Exxon-Mobil avait dépensé 11 milliards $ (sur les 31,6 milliards $ de profits réalisés au cours des trois premiers trimestres de 2011) en rachat de ses actions afin d’augmenter son rendement, et par le fait même les revenus de ses dirigeants payés en stock options. Avec l’effondrement actuel des cours des actions, Les programmes de rachat d’actions se multiplient. Plutôt que d’investir dans l’économie réelle, qui en aurait un urgent besoin, les grandes sociétés (en particulier les pétrolières et les institutions financières) participent à une destruction massive de richesse pour enrichir le 1% des plus riches.
Dictés par les actionnaires, les entreprises rachètent leurs propres actions pour faire remonter les cours, entraînant parfois des pertes d’emplois. Récemment, un article du New York Times illustrait les cas de trois entreprises des États-Unis dont les rachats d’action et les mises à pied se faisaient en simultanée : Pfizer, qui décidait d’augmenter de 4 à 9 milliards $ le budget alloué aux rachats d’actions et de mettre à pied 1 100 employés de son service de R&D; Campbell Soup annonçait un rachat de 1 milliard $ en actions et, cinq jours plus tard, l’élimination de 770 postes; Hewlett-Packard qui annonce pour 10 milliards de rachat d’action en juillet et 500 mises à pied en septembre. Tout ça pour qu’à la fin de l’année financière les actionnaires, et en tout premier lieu les dirigeants de ces entreprises, voient leurs revenus déjà substantiels augmenter encore plus.
En France, c’est l’entreprise Bouygues (active dans ce que les Français appellent le BTP, les médias et les télécommunications) qui a mené la plus vaste opération de ce genre jamais menée dans ce pays. L’offre publique de rachat portait sur près de 12 % du capital, soit 1,25 milliard d’euros. Que va faire l’entreprise avec ces actions rachetées ? Les annuler évidemment, pour diminuer l’offre et en augmenter le prix articficiellement.
« Plusieurs sociétés, signale le magazine français Les Echos, ont profité de ces cours bas pour procéder, à l’image de Bouygues, à des rachats d’actions massifs. Alors que les grands groupes regorgent de cash, les entreprises du SBF 120 ont acquis 747 millions d’euros de leurs propres actions, sur les trois premières semaines d’août, d’après les données de Natixis. Cela porte à presque 4,3 milliards d’euros le montant cumulé sur huit mois, soit un total déjà supérieur à celui de l’ensemble de l’année 2010 ».
Au Canada, Léo-Paul Lauzon signalait en début d’année que la même chose se produisait ici. À sa manière (en utilisant des coupures de presse), il soulignait que, malgré leur santé financière, les entreprises se stimulaient pas suffisamment l’économie par le biais d’investissements productifs. « En fait, de 2004 à 2009, la CIBC a racheté des actions et versé des dividendes pour 11,7 milliards$ sur des profits de 7,1 milliards$ et la Banque de Montréal du lucide Jacques Ménard a retourné à ses actionnaires pour 3,7 milliards de dollars sur des bénéfices de 3,9 milliards$ en 2007 et 2008. »
Le prof Lauzon reprend aussi le constat établit par Don Drummond, de la Banque TD, qui déclarait dans La Presse du 4 juin 2010 : « Les entreprises canadiennes, malgré des mesures d’incitations (fiscales et subventions) importantes des gouvernements ne suivent pas le rythme en matière d’investissements et d’innovations. En fait, de 2002 à 2007, les entreprises canadiennes ont sous investi dans les équipements clé et n’ont pas suivi la cadence des autres pays de l’OCDE ».
Le détournement des pharamineux profits engrangés par les pétrolières et les institutions financières en dehors des circuits économiques représente l’une des principales causes de la crise que nous vivons aujourd’hui. Les solutions passent nécessairement par leur « socialisation » !
[...] économique que nous vivons depuis 2008 est que les entreprises ne dépensent pas assez. Je le mentionnais dans un billet récemment, une trop grande part des profits est sorti du circuit économique par des rachats d’actions. [...]